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The Art Of Sod
publié le 11 février 2025 publié le 09 février 2025
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The Art of Self-Defense
Slightly Dishevelled / Dirty Dishes And The West Wing
L'Irlande a le vent en poupe ces derniers temps en matière de noise. Avec Slightly Dishevelled, on tient un rejeton qui vaut le détour et sort du lot. Dirty Dishes And The West Wing est leur premier album uniquement dispo en cassette et s'il y a à boire et à manger, vous en ressortirez repu dans tous les cas. Le quintet de Dublin s'en donne à coeur joie dans la débauche sonique. De brefs interludes descendant jusqu'à quinze secondes se contentant d'une simple sirène hurlante qui roule à toute allure (Nenagh, Nenagh) pour surcharger les sens. Une très longue compo de plus de douze minutes (Passing) où il ne se passe pas grand chose et que vous pouvez zapper. Une reprise d'un fameux morceau traditionnel irlandais popularisé par The Pogues (Waxie's Dargle). Et neuf autres titres (sur 14) affichant un visage tendu, virevoltant, urgent avec un Smokey Bacon bien barré au milieu, un noise-punk éclaté, trépidant, extraverti à l'instar de son chanteur, enthousiaste, qui met de réelles bonnes claques comme Fairly Regal ou Bank Account et une touche psyché pour conclure avec Mezzanine Mind. Un truc assez inclassable au final et plein de vie qui inflige une bonne grosse dose de fraîcheur à vos tympans toujours en recherche de bruits nouveaux.
[publié le 21 mars 2025]

Weird Machine / Normal Music II
Second EP pour le trio de Boston et ça s'annonce de mieux en mieux alors que le début était déjà vachement bien. On touche du doigt crochu le noise-rock dans ce qu'il a de meilleur. Fort en gueule et durement poignant (le monstrueux Golden Age), anguleux, abrasif, tortueux juste ce qu'il faut avec la section rythmique qui tabasse avec souplesse et mesure, un souffle de rock à la Metz sur Desk Job et des compos à se damner et se pâmer de plaisir comme Complainer qui s'écoute en boucle. Weird Machine, retenez bien ce nom.
[publié le 16 mars 2025]

Radar Men From The Moon x Twin Sister / Mirrors For Discharge
La rencontre des six hollandais de Radar Men From The Moon et le trio Twin Sister sur la scène du Roadburn Festival en 2022 donne Mirrors For Discharge. Cinq longs morceaux dont Echo qui résonne quasi un quart d'heure. Vous n'entendrez jamais le bruit du public, pas d'applaudissement, rien, nada. Sonne comme un enregistrement studio que cette hydre à neuf têtes n'a d'ailleurs pas manqué de modifier en studio en faisant des ajouts. Mais c'est pour notre bien, pour profiter pleinement de cette lourdeur, ces répétitions qui s'envolent ou éclatent, cette pression qui monte et monte encore, cette masse aussi sombre que lumineuse s'étendant comme une grosse boule d'angoisse, bénéficier de la puissance des trois batteries, deux guitares, deux basses plus un synthé et un chant qui sont capables également de s'engager dans des structures plus rock, explosives et intenses comme sur Well Of Reflection. Une très belle bête qui mériterait de voir le jour sur un vrai disque.
[publié le 14 mars 2025]

Sinews / Choreography
Deuxième sortie pour le groupe anglais Sinews après Reanimated EP tout début 2024. Cinq nouveaux titres sur une cassette pour continuer à parcourir de multiples courants bruyants sans véritablement s'attarder sur l'un. Ça l'air un peu bâtard dit comme ça mais Sinews ne manque pas de personnalité ni de charme grâce à des compos énervées et enlevées qu'on rangera sous la bannière noise-rock. Mais c'est fait sans débauche excessive de violence ou de matraquage velu. C'est de l'Anglais avec le souci de la mélodie, un brin de subtilité à l'instar de Prop Comic alternant entre calme et puissance, chaque titre possédant son accroche bien placée finissant par tout arracher avec les stridences d'un violon sur le dernier morceau The Steps. Ça peut paraître affreusement classique comme approche et ça l'ait sûrement mais Choreography fait valser les doutes, vous pouvez suivre leurs pas sans crainte.
[publié le 08 mars 2025]

Excrucis / There Are Collectivities That Devour Souls
Excrucis vient de Chicago et tout ce qui vient de Chicago ne sonne pas noise-rock. Mais ça fait beaucoup de bruit quand même. Et de cris avec Linda Sherman. Et pas que des cris. Tout un panel vocal qui la rapproche de la chanteuse de Couch Slut qui fait que c'est elle qui détient les rênes de l'affect, capable d'être aussi mélodique que se torturer les cordes vocales, colérique et désespérément rageuse avec beaucoup de justesse et de conviction. Il en va de même pour la musique. Dans les milieux autorisés, on parle de sasscore. Un truc qui vient du punk, du screamo, du post-hardcore avec une pointe de no-wave et pas mal d'émotions derrière tout le raffût. Et surtout de surprenants décrochages mélodiques avec un guitariste beaucoup plus fin et inventif que la moyenne du genre comme sur Parasite, des changements de rythmes inopinés qui passent crème (allant jusqu'à une fin trip-hop sur la fin de Dépassement), une urgence à fleur de peau et un florilège de titres assez brefs qui accrochent parfaitement le ciboulot à l'instar de I Resign, Misery Must End ou Ceasefire. Cassette sur Zegema Beach records.
[publié le 07 mars 2025]

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The Art of Losing (+)
Condominium
Gag - 7''
Deer Healer records 2010
Carl - 7''
Sub Pop records 2013
Thug - 7''
Condominium records 2014
[publié le 23 mars 2025]



Quatrième single de Condominium et le dernier en formation quatuor avant le départ de la bassiste Kim. Il a pour nom Gag et cela n’a rien à voir avec la pochette qu’on appellera pudiquement une performance. Par contre, la musique de Condominium ne fait toujours pas rire. Le groupe de St Paul nous avait laissé sur une très bonne impression l’année précédente avec Barricade. Il revient en 2010 armé d’intentions aussi belliqueuses que larvées. Quand Condominium n’est pas frontal, il n’en est que meilleur. Et qui aurait pensé après le premier single qui alignait quatre titres en quasi autant de minutes que ce groupe allait sortir une compo de plus de sept minutes deux ans plus tard ? C’est le délire de Gag et c’est un grand moment de passion primaire, une longue montée ne s’embarrassant pas de superflu, qui avance méthodiquement, cogne avec amour et délivre son fiel dans une simplicité prenante. Sur la face B, si Condominium semble vouloir se racheter de quelques mauvaises actions avec Redemption Song, ce n’est sûrement pas de lorgner chez quelques bons groupes sauvages et hirsutes de Amphetamine Reptile avec un titre qui secoue bien le cocotier noise-rock. Quant à The Entire Human Body, c’est un instrumental ressemblant à une descente de trip avec une mélodie psychédéliquement malade et plein de bruits étranges. Condominium est décidément plein de surprises sur ce single loin des standards du début.

:: download Gag 7''

info : 33 rmp, 1 insert with lyrics. Recorded by Matt at A Harder Commune Studios May 2009. Condominium are Brad, Kim, Joe, Matt.





Après un album dont on reparlera plus tard, Condominium désormais en trio refait son apparition avec un cinquième single en 2013 chez Sub Pop. Rien que ça. Après des sorties à l’arrache sur leur propre structure et autres labels DIY miséreux, c’est une belle promotion. Qui ne fera rien de plus pour leur gloire. Faut pas déconner non plus. Pouilleux un jour, vilain petit canard pour la vie. Ce single trois titres a pourtant de quoi en mettre plein la tronche. Tout d’abord avec Show Them et Eating The Universe qui font songer à une version plus farouche de Pissed Jeans, c’est à dire un rustre moment de rock’n’roll noise ne faisant pas de quartier. Jouissif. Et puis avec Carl, la face B qui a donné son nom à ce single. Le chanteur-bassiste Matt Castore en a bouffé de ce rongeur et avec les poils pour donner ce grain enroué inimitable et menaçant. Et comme Carl fricote de travers, soupèse la tension, se cabre, avance à une cadence plus tempéré incitant à la méfiance afin de mieux libérer toute la frustration qui le travaille, Carl est tout simplement un des meilleurs morceaux de leur répertoire. Passé et à venir.

:: download Carl 7''

info : 45 rpm. Condominium are Brad, Joe, Matt. Engineered by Matt, January 2013 at A Harder Commune Studio.





Thug paraît en 2014. C’est le sixième single et le dernier. Le batteur est parti vivre à New York. On retrouve trace d’ultimes concerts en 2017. Le groupe n’a jamais officiellement splitté mais n’a pas donné signe de vie depuis. Après Sub Pop, retour à la maison sur leur propre label qui a le même nom que le groupe pour la référence Condo-05. Trois titres qui laissent des regrets car le trio semblait maîtriser de mieux en mieux son sujet. Entre leur approche punk-noise plus frontale et ce désir de brouiller les pistes et un peu les structures, Thug, Limits Of Awareness et encore plus Perfect Gift sur la face B sont trois belles balles fumantes, un mélange idéal de nuisances et de jubilation primaire, de matraquage et de tortuosité.

:: download Thug 7''

info : 45 rpm with lyrics. Condominium are Brad, Joe, Matt. Engineered by Matt at A Harder Commune Studio, March 2014.

 
Condominium
Hello Tomorrow - 7''
Condominium records 2008
Pupils - 7''
Condominium records 2008
Barricade - 7''
Fashionable Idiots records 2009
[publié le 16 mars 2025]



Condominium, un groupe de St Paul, Minnesota, un album au compteur et surtout spécialiste du format single. Il en compte six. On débute par les trois premiers. On oublie trop souvent que Condominium a commencé en tant que quatuor avec Matthew Castore (chant), Brad Stiffler (guitare), Joe Boyd-Brent (batterie) et une certaine Kim à la basse qu’elle délaissera au bout du quatrième single. C’est Castore (qui à la base du groupe) qui cumulera alors les postes de bassiste et de chanteur. Hello Tomorrow est le nom de leur premier single en 2008. Quatre titres qui ne sont pas les meilleurs de leur répertoire mais pour ce groupe qui venait de se former à peine un an auparavant, l’urgence a toujours été de mise alors pas de perte de temps, il faut bien commencer un jour, on peaufinera plus tard. Quatre titres entre 90 et 120 secondes d’un hardcore-noise crapouilleux et primaire, entre Black Flag et les énergumènes d’Amphetamine Reptile résidant à quelques encablures de St Paul avec ce qu’il faut de dissonances et de larsens à l’instar de Elevators ou la fin de Let’s Die pour vriller les oreilles et se dire que le meilleur est à venir.

:: download hello tomorrow 7''

info : 45 rpm, 1 insert with lyrics. Condominium is Brad, Joe, Kim and Matt. Recorded October 2007 by Matt at So Mournful Studios. As if you could kill time without injuring eternity.





La même année, en 2008, Condominium enchaîne avec Pupils. C’est le nom de la face A, le titre principal et on sent déjà chez Condominium la volonté de tordre le cou à des structures trop rectilignes, de rajouter de l’intensité et de l’abrasion sans que cela passe par la rapidité du rythme, aller voir si au-delà des trois minutes s’il existe une vie pour le punk qui sommeille en eux et se rapproche ainsi d’un Hammerhead première période. C’est leur premier bon morceau. Face B, On/Off et Displacement reviennent aux fondamentaux. Avec hargne et panache et une couche de puissance supplémentaire par rapport à Hello Tomorrow et d’un bon gros bordel en plein milieu de Displacement. Tout ça est bon signe.

:: download pupils 7''

info : 45 rpm, 1 insert with lyrics. Condominium are Matt, Kim, Brad, Joe. Recorded by Matt at So Mournful Studios June 2008.





L’année suivante, Condominium publie Barricade. La basse de Kim en intro commence à prendre du nerf et plus de place montrant la voie à une compo qui n’a plus peur de s’étendre. Et ça sera pareil pour la face B Big Plans qui titille les cinq minutes. Le quatuor n’hésite pas à développer ses idées, se faire un brin plus tortueux, réfléchir avant de frapper pour que ça soit plus efficace, voir carrément ralentir sévèrement la cadence sur Big Plans donnant dans la ballade instrumentale virile. L’influence de certains groupes de chez Amrep se fait de plus en plus sentir et ça, c’est vraiment un signe fort.

:: download barricade 7''

info :
45 rpm, 1 insert with lyrics. Condominium are Brad, Joe, Kim, Matt. Recorded May 2009 at A Harder Commune Studios with Matt.



 
The God Machine
One Last Laugh In A Place Of Dying... - CD
Fiction records 1994
[publié le 02 mars 2025]



Le blanc du deuil. Une pochette d’un dépouillement exemplaire. Et ces tristes et sobres mots au verso, Dedicated To Jimmy Fernandez et à l’intérieur du CD, For Our Friend Jimmy. Jimmy Fernandez, bassiste de The God Machine, mort à 29 ans alors que le trio portait la touche finale à son deuxième album One Last Laugh In A Place Of Dying…. Qui ne se serait sans doute pas appelé ainsi sans ce funeste évènement. Il a été dit que les deux membres restants, Robin Proper-Sheppard (guitare, chant) et Ron Austin (batterie) sous le choc du décès de leur ami ont laissé les morceaux en l’état, aucune modification supplémentaire n’a été apporté et les titres utilisés pour les sessions de travail pendant l’enregistrement sont restés ainsi. The Devil Song, The Life Song, The Train Song, The Sunday Song, etc. Est-ce pour cette raison que cet album sonne plus brut (toutes proportions gardées), avec moins d’arrangements ou de samples comme sur Scenes From The Second Storey ou cela n’aurait rien changé ? Toujours est-il que One Last Laugh In A Place Of Dying consacre The God Machine comme un formidable groupe à la qualité d’écriture hors-norme. Encore plus d’une heure de musique, quatorze compos et pas une seule seconde à jeter. Des riffs qui marquent au fer rouge (The Tremolo Song, Mama, Alone, The Love Song, Painless) sur un disque aux effluves générales plus dures et rock à l’instar de Evol qui est le morceau le plus abrupt et noise de leur répertoire. Dans un monde parfait, ces morceaux auraient dû être mondialement connus. Les mélodies coulent de source. Les compos aussi longues soient elles se déroulent sans accro et sans temps mort. Et la subtilité n’a pas quitté The God Machine, tout comme cette profonde mélancolie, cette sourde tension qui rend la musique encore plus belle et prenante. Et les violons présents sur In Bad Dreams et The Hunter, les samples se mélangeant à la fin de The Devil Song, la guitare acoustique sur The Flower Song et la classe de ces morceaux qui n’avaient pas besoin d’ajouts font dire que cet album était le produit final que The God Machine souhaitait et que la mort subite de Fernandez n’a rien changé. Comme pour Scenes From The Second Storey, ce second album vient d’être réédité en vinyle et en a profité pour se refaire un relifting sonore. Aucune idée comme ces rééditions sonnent mais si vous voulez l’original, ces deux albums incontournables sont là pour vous. Après The God Machine, Robin Proper-Sheppard a crée Sophia (toujours actif) alors que Ron Austin, après près de trente ans d’arrêt de toutes activités musicales, a retrouvé le chemin des studios avec Mercylane.

:: download one last laugh in a place of dying CD

info : Produced by The God Machine, engineered by Kenny Jones, recorded at Blackwing Studios and Matrix Studios. Strings for In Bad Dreams and The Hunter arranged by Robin Proper-Sheppard and Nick Ingam, performed by Peter Lale, Martin Loveday, Perry Montague-Mason and Gavyn Wright. Thanks to all those who still believe. Dedicated To Jimmy Fernandez.



 
The God Machine
Scenes From The Second Storey - CD
Fiction records 1993
[publié le 23 février 2025]



La réédition en vinyle en ce début d’année des deux albums de The God Machine a donné envie de ressortir les vieux CDs. Et si un groupe mérite qu’on braque à nouveau les projecteurs sur lui, c’est bien The God Machine. C’est pas qu’il soit totalement inconnu, loin de là, mais il aurait pu être énorme, devenir un groupe phare des 90’s. Il est juste devenu culte, un groupe oublié, un groupe qu’on chéri jalousement en marge des courants dominants et dont le nom fait toujours frissonner ceux qui savent. Mais la tragédie a frappé The God Machine. Pendant l’enregistrement du second album en 1994, le bassiste Jimmy Fernandez meurt d’une hémorragie cérébrale après avoir été admis à l’hôpital quelques jours plus tôt suite à de violents maux de tête. Dévastés, les deux autres membres du groupe, Robin Proper-Sheppard (guitare, chant) et Ron Austin (batterie) mettent fin à The God Machine. Mais ceci n’explique pas entièrement le fait que leur premier album Scenes From The Second Storey publié un an auparavant n’ait pas connu le succès qu’il aurait dû obtenir. Ne figure jamais dans aucun bilan et autres classements à la con des meilleurs albums de l’année. The God Machine n’a pas réussi à trouver sa place dans un monde musical trop compartimenté. Et encore moins sa place dans son pays d’origine. Les trois membres sont américains, originaires de San Diego et Los Angeles. Mais c’est en déménageant en Angleterre en 1990 qu’ils vont se faire connaître et passer pour un groupe anglais et qu’il reste largement méconnu de l’autre coté de l’Atlantique. Après quatre maxis, le trio publie carrément un double-album pour ses débuts sur Fiction records, le label connu pour héberger The Cure. 78 minutes. Rien que ça. Qui commence par un sample d’une citation de l’écrivain Paul Bowles sur Dream Machine, soit exactement le même sample qui ouvre Enemy Of The Sun, l’album de Neurosis paru aussi en 93. Un premier disque dans lequel The God Machine a déversé toute sa grandeur, ses tourments, sa colère, sa tristesse. Un disque aussi sophistiqué que brute, solennel, mystique, profondément mélancolique et sombre, tribal et lumineux, capable de passer de rythmes lourds et de riffs puissants à des moments d’une rare grâce et beauté (It’s All Over qui fend le cœur, The Piano Song), parfois au sein d’un même morceau comme The Blind Man qui débute à la guitare acoustique et termine dans une chevauchée violente et exaltée ou les neuf minutes de Purity balançant entre musique symphonique et cavalcade tribale et répétitive. Capable d’alterner le calme et la tempête, la simplicité et la complexité, d’écrire des titres qui avaient tout pour devenir des tubes (She Said, Out, Home avec les magnifiques Voix Bulgares en intro) et les longues pièces à se damner (Seven qui en fait seize de minutes avec clarinette, violon et violoncelle à l'appui), évoquant aussi bien Swans période Love Life que Spacemen 3, The Cure ou Joy Division pour ne finir par ressembler qu’à eux-mêmes, pratiquant autant le post-rock qui ne s’appelait pas encore comme ça que le metal le plus brillant et bien d’autres courant que le trio a amalgamé pour le fondre dans sa propre matrice. Un mélange unique de force et de fragilité avec le chant du torturé Robin Proper-Sheppard pour treize compos marquantes et charismatiques, avec de l’espace et de l’ampleur qui décuple l’impact de cette musique, tout comme elle pouvait se révéler hypnotisante en concert si mes maigres souvenirs d’un show à Londres en 93 ne sont pas déformés. Un album épique qui n’a toujours pas d’équivalent.

:: download scenes from the second storey CD

info : Robin Proper-Sheppard vocals, guitar. Ron Austin drums, piano. Jimmy Fernandez bass. Produced by The God Machine, engineered by Kenny Jones. All songs recorded at Blackwing, Maison Rouge and Matrix studios, London except the Piano Song and It's All Over recorded at Joe's garage with Roger Askew and Temptation as a live improvisation recorded in room three. All songs mixed by Kenny Jones at Matrix studios. Mastered at the Townhouse by Kevin Metcalfe. Vocal chant on The Desert Song by Katharine Gifford. Programming by Andy Montgomery, preacher provided by the burting church, vocal on Home by the Voix de Bulgares, clarinet on Seven by Ian Bishop. Purity recorded acoustically with Christiane Van Der Lee on cello, Anthony Pleeth on cello, Gavyn Wright on viola and Neil Filby on violin, string arrangement by Robin Proper-Sheppard; conducted by Nick Ingman. All other atmospheric nuances and nuisances created by The God Machine and Kenny Jones. Sleeve by Designland.



 
Roof
The Untraceable Cigar - CD
Red Note/Manifatture Criminali records 1996
[publié le 09 février 2025]



Roof était un groupe né de l’initiative de Tom Cora au violoncelle et Luc Klaasen plus connu sous le pseudo de Luc Ex pour avoir été le bassiste de The Ex de 1985 jusqu’à l’album Dizzy Spells en 2001, qui se connaissaient depuis les deux albums collaboratifs entre Cora et The Ex en 91 et 93. Avec le batteur Mickael Vatcher et le chanteur Phil Minton qui a fêté ses 84 ans en novembre dernier, le quatuor a publié en 1996 The Untraceable Cigar, premier et unique album et pas seulement parce que ce fût le seul album de Roof. Tout concourt à ce que ce disque soit un mets de choix. Musique improvisée, punk, avant-garde, rock débridé, free-jazz déconcertant, The Untraceable Cigar reflète les univers de musiciens venant d’horizons très variés pour créer une symbiose aussi dingue que poétique, une secousse tellurique et des envolées sensibles explosant en milliers de fragments semblant prendre des trajectoires opposées pour finalement se regrouper sur un canevas improvisé qui tient divinement la route et embarque dans des contrées inexplorées. Le chant de Minton, vocaliste d’exception à base de scat (technique venant du jazz consistant à émettre des sons uniquement composés de borborygmes, onomatopées, couinements, syllabes inintelligibles, imitation vocale d’instruments) et qui ne chante que le temps de The Prince dans un registre proche de Tom Waits ou sur The Letter (une reprise de Harry Partch) est pour beaucoup dans ce sentiment de folie aliénante qui suinte dans chaque morceau. L’intensité qu’il y met est subjuguante. Et entre le jeu de batterie très free et plein de convulsions et déchirements de Vatcher, les lignes de basse toujours aussi inspirées et percutantes de Luc Ex et les tirades de Tom Cora se révélant mélodiques, tendues, tortueuses, grinçantes, libres d’aller où bon il veut, The Untraceable Cigar est une création originale, belle, cathartique, dérangeante, fertile en rebondissements et en accalmies somptueuses avec des titres comme The Trace, Blind Spots, Janna Lied, Sage In Doubt et surtout Diving Bell. Neuf minutes trente d’une répétition qui va crescendo dans la tension, la démence, joue avec les nerfs, un Phil Minton qu’on ne contrôle plus pour une compo qui devient encore plus belle avec les notes du violoncelle prenant des tournures simples, profondes et mélodiques avec un minimum de changement. Une transe saisissante. Hélas, Tom Cora meurt le 9 avril 1998. The Untraceable Cigar n’aura donc pas de suite. Reste un album live, Trace, qui paraît en 98, avec trois inédits à la clef. Les trois membres restants vont tout de même créer 4 Walls avec le pianiste Veryan Weston à la place de Cora mais la magie n’est pas aussi forte. Reste aussi le souvenir tenace d’un concert de Roof à Rennes aux Tontons Flingueurs, deux jours avant le décès d’un Tom Cora qui avait voulu faire une dernière tournée alors qu’il se savait condamné par la maladie, mourir sur scène où il avait toujours vécu et rayonné. Et c’est l’impression qu’il a donné ce soir là. Personne n’oubliera le sourire qu’il avait affiché comme par magie une fois sur la scène exiguë des Flingueurs alors que juste avant, depuis que j’avais été le chercher à la gare de Rennes avec Phil Minton jusqu’à quelques secondes de quitter le backstage, son humeur était massacrante. Le bonheur n’avait pas quitté son visage une seule seconde du concert pendant qu’il triturait son violoncelle dans tous les sens. Le concert avait été de toute beauté et restera à jamais un moment spécial personnellement. Ça me tenait à cœur de lui dire par ces quelques mots, bien qu’il ne le saura jamais, qu’avec la discussion que nous avons eu après le concert alors que je le raccompagnais à son hôtel, il m’a tout simplement sauvé la vie.

:: download Roof CD

info : Tom Cora cello, Luc Ex bass, Phil Minton vocals, Michael Vatcher drums. Recorded and produced by Dolf, mixed by Dolf and Roof, at the Koeienverhuurbedrijf studio in Purmerland, Netherlands, in January and February 1996. Photos and design Isabelle Vigier, cover photo by Les Frères Lumière.







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