Headcleaner
Bogieman EP - 12''
Eve recordings 1992
Au Fou - LP
Eve recordings 1992
The Peel Session - 10''
Strange Fruit records 1992
[publié le 24 mai 2020]



Headcleaner est né en novembre 1990 à Brixton. Martin P. Burnside Willis au chant et à la guitare, l’indéboulonable Guy Siddle, plus connu sous le surnom de Pid, à la basse et un français infiltré dans les rangs rosbeef, un Picard du nom de Erick Legrand (souvent orthographié Le Grande) à la batterie (décédé le 22 novembre 2011 à l’âge de 46 ans et dont vous pouvez écouter une partie de ses enregistrements post-Headcleaner sur cette page bandcamp qui lui est consacrée avec un bel hommage de Mad Martin à la clef). Un groupe qui a tourné de très nombreuses fois dans l’Hexagone, ce qui lui a valu une belle reconnaissance ici, beaucoup moins en Angleterre où le trio a contribué à dessiner les contours d’une scène noise aux cotés de Silverfish, Therapy? (bon d’accord c’était l’Irlande du Nord), Th’ Faith Healers ou World Domination Enterprises et secouer le milieu rock anglais sclérosé en ce début de décennies, tout en se démarquant du mouvement grunge qui frappait de plein fouet les groupes à guitares électriques. Un trio qui avait atterri dans le quartier de Camden à Londres et qu’on aurait bien vu signer sur Wiiija records pour tout casser en compagnie de Sun Carriage, Loveblobs, Terminal Cheesecake ou encore Bastard Kestrel qui mettaient également un bon coup de pied dans la fourmilière rock anglaise. Mais Headcleaner a sorti son premier disque sur Eve recordings le 22 avril 1992 et c’est Bogieman, un maxi quatre titres (format qui se faisait beaucoup à l’époque et tombé en totale désuétude depuis) qui servit de carte de visite à Headcleaner. Et contrairement à beaucoup de maxis qui contribuaient à mettre en valeur le morceau phare d’un album à venir, Bogieman comporte quatre inédits. Produit par Robin Proper-Sheppard (The God Machine), ce premier enregistrement montre un Headcleaner déjà très ferrailleux, abrasif, bordélique. Jamais compris les comparaisons avec Jesus Lizard ou Killing Joke ou Hammerhead. C’est le son de Camden, ce groove bagarreur, cette guitare qui couine, la saleté qui suinte avec classe avec deux titres sur la face A qui tourne en 45 tours (Bogieman et EM) pleinement percutants et addictifs. Sur la face B, ne pas oublier d’ajuster la platine et de basculer en 33 tours pour se prendre Paranoid qui n’est pas une reprise de Black Sabbath mais alourdit bien le rythme. Et les huit minutes de Jesus d’une humeur rampante crucifie tour à tour d’une lenteur vénéneuse et d’une soudaine bourrasque chaotique, démontrant que Headcleaner avait déjà plusieurs cordes à son arc et que le bruit était comme une seconde peau.





Toujours en 1992, Headcleaner publie Au Fou. En français dans le texte avec en sous-titre la traduction pour les sujets de Sa Majesté : (O Foo) n. The Fool; to indulge in buffoonery. Et des bouffonneries, Headcleaner va t’en délivrer par paquet de onze, ras la gueule de titres qui déboîtent et font des putain d’étincelles à l’instar du type qui les accompagnait parfois sur scène avec sa meuleuse ou un truc dans le genre et dont une photo orne le verso de Au Fou. Dingue, oui, ce trio l’était certainement mais aussi sacrément malin et du haut de leur bordel savait torcher de beaux morceaux de noise syncopée, tribale, rocailleuse, sèche avec la basse distordue de Pid au milieu de la mêlée qui faisait des ravages. Quelques samples bien placés comme les voix de gamins qui servent de chant sur Song For Megan, une construction toute tordue et étrange sur Yardstick et des torrents de riffs aussi flamboyants et dangereux que la meuleuse pour une grosse bordée de titres sauvages n’ayant rien perdu de leur corrosion et leur fort pouvoir d’attractivité.





1992, c’est aussi l’année où Headcleaner a publié une Peel Session (Pid sur la gauche avec la casquette à l'envers, le frenchy au milieu et Willis et ses dreadlocks). Elle a été enregistrée le 14 juin 1992. Trois titres figurant sur Au Fou (XL5, Fear et Attitude) et une reprise de Motörhead, l’incontournable Ace Of Spades. Par contre, les versions sont très fidèles aux originaux avec une prise de son qui n’est pas des plus fameuses sauf bizarrement sur Attitude un poil plus agressif, lourd et épais que sur Au Fou et les backing vocals de bête en rut sur Fear encore plus impressionnants. Quant à la reprise, on a mal pour la gorge de Martin Willis qui a dû bien se marrer avec ses deux acolytes mais c’est à peu près tout.