convulsif
hummus


Convulsif
Extinct – LP+7’’
Hummus records 2020

La Suisse a toujours été très forte pour sortir des groupes à la personnalité très affirmée se distinguant largement du lot du commun des mortels et dont le bruit qui sortait de leurs amplis ravageait toutes nos certitudes dans le monde sonore. Alboth!, 16-17, Young Gods ou Goz Of Kermeur, que des experts en structures trapézoïdales, des noise makers de première ordre sans concession évoluant dans des configurations sortant des sentiers battus. Convulsif est de cette trempe. La tradition, ça a du bon.
Batterie (Maxime Hänsenberger), basse (Loïc Grobéty), clarinette basse (Christian Müller), violon (Jamasp Jhabvala) avec du nappage électronique, voilà l’équation singulière à laquelle vous êtes confrontée si vous osez pénétrer dans le monde extra-ordinaire de Convulsif. Extinct est déjà leur cinquième album. Il était grand temps de s’intéresser à eux.
Un groupe du genre inclassable. Vous verrez valser toutes sortes d’étiquettes pour tenter de catégoriser Convulsif mais s’il ne fallait en retenir qu’une au final, ça serait rock. L’énergie, l’intensité, l’urgence, l’aliénation, l’envie de tout faire sauter, Extinct n’est que ça. Qu’importe les moyens mis en œuvre, les instruments rentrant dans la fabrication, la durée des cinq morceaux naviguant entre deux minutes à peine et plus de treize, Convulsif est férocement et fatalement rock.
Une histoire de puissance, d’ampleur, de force destructrice, brutal et solennel mais aussi de répétitions oppressantes, de ténébreuses rémissions, de morceaux qui enflent et aggravent considérablement et inexorablement la montée de la tension et une hypnotique beauté se dégageant de cet impressionnant tourbillon conquérant tout sur son passage et vous renversant comme une lame de fond à la profondeur insoupçonnée. Les deux pièces maîtresses que sont Five Days Of Open Bones et The Axe Will Break sont ainsi incroyablement imposantes mais étonnamment aériennes, tempérées, mélodiques au début puis peu à peu inquiétantes et subjuguantes dans ces implacables ascensions vers des sommets où les déchaînements sont tout en maîtrise, centimètre par centimètre mais réels avec une vue splendide qui prend à la gorge, notamment sur The Axe Will Break qui laisse sans souffle.
Chaque instrument se fait une belle place, résonne durablement même quand ça tape durement dans tous les sens, que le groove casse en mille morceaux, que ça souffle avec passion dans une clarinette basse aux magnifiques sonorités graves et que le violon crie pendant que les effets electronics finissent par napalmer la raison.
Et si Convulsif signifie une contraction brusque, violente et involontaire d’un ou plusieurs muscles, voire de tout le corps, Torn From The Stone symbolise parfaitement cette définition. Un titre figurant sur un single bonus qui n’est pas fourni avec toutes les versions vinyles (voir le CD aussi ?) mais uniquement sur une série limitée. Et ça serait bien dommage de se passer de ce monstrueux titre. Deux minutes trente d’un impossible carnage qui renvoie dans les cordes The Flying Luttenbachers, Naked City et Alboth!, une frénésie spectaculaire tout à fond qui laisse à genoux et un peu plus bas que ça, ce qui doit être à peu près l’état des quatre musiciens et surtout le batteur à la fin d’un typhon bénéficiant d’un génial clip. Extinct, ainsi appelé parce que les sombres temps qui courent n’incitent pas à l’optimisme et que Convulsif s’est ironiquement servi de journal de bord de Charles Darwin pour nommer ces titres en mode cut-up. Le big bang peut arriver, Extinct fera un splendide bouquet final.

SKX (11/11/2020)