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Melt Downer
s/t – CD
Cut Surface/Numavi records 2017

On n'avait pas eu de nouvelles de l'Autriche depuis la fin de Valina. Je ne suis pas un fin connaisseur de la scène locale, quelques talents se cachent sûrement dans les montagnes mais c'était un peu pas mal beaucoup radio silence dans cette partie des Alpes. Melt Downer va donc se charger de réveiller tout ça.
Un nouveau trio de Vienne que pourra grandement apprécier le fan de noise qui sommeille dans chaque être normalement constitué. Mais pas que. Si Melt Downer cite Steel Pole Bath Tub comme influence (ce qui n'est pas banal pour un jeune groupe et qui n'est pas faux), Unwound, Girl Band ou Destruction Unit auraient pu être ajoutés à la liste. Et beaucoup d'autres puisque le spectre musical est large. Le bruit reste en fil rouge mais les manières de le monter en sauce, le tordre, l'exploser, l'amadouer sont très variées.

L'album commence par trois salves expéditifs avec mur de guitare très noisy, batteur déchaîné et un voile mélodique sous le déluge. On sent comme poindre déjà une aura psychédélique dans le traitement sonore avec une grosse effusion de sonorités barbelés pour noyer l'impression. Mais au quatrième morceau, Patterns In Random Data, Melt Downer affiche des velléités psyché qui ne se cachent plus. Sept minutes durant lesquelles le trio baisse d'un ton et d'un bon, s'envole dans des contrées toujours noisy mais plus légères et mélodiques (même si ça sent le bad trip au final vu que le groupe ne peut pas s'empêcher de placer un peu de bordel).
Ce premier album va ainsi osciller entre franches attaques noise et échappées enfumées, avec de nombreuses nuances dans la virulence, un chant s'adaptant au contexte, des mélodies fuyantes ou en apesanteur, des vagues de rythmes revenant inlassablement dans la tronche ou à la coloration plus dub, ronde et apaisé sur Sri Lanka. Pour sûr, Melt Downer te fait voir du pays. Huit minutes d'un long glissement en territoire bigarré. Le voyage visite la maison de King Champion Sounds, sort les percussions, des bruitages exotiques, une mélodie dérapante et tente de vous amener dans une transe aussi doucement dansante qu'étrange. The Leisure Death possède également une texture assez entraînante, plus flottante. Mais c'est quand Melt Downer est en position baston convulsive qu'il est le plus convaincant. Le déluge et les saturations, le fuzz, les larsens lavent à sec, mettent les nerfs à vif et tremper dans une aura mélodique et fougueuse, l'effet est assez impérieux.

Et quand vous pensez avoir fait le tour de toutes les possibilités du trio, Melt Downer assène le coup final, Dawner et sa demi-heure infernale. Le trio n'avait pas encore testé le doom, la franche lourdeur, la puissance de riffs implacables et grésillant de partout, une basse enclume et la répétition écrasante jusqu'à plus soif (après un bon quart d'heure de ce traitement, vous n'êtes pas obligés de poursuivre l'aventure) avec en arrière-fond un bruitage expérimental et décalé pour un climat anxiogène et mouvant. Ce groupe est donc capable de tout et se montre étonnement à l'aise dans ces différentes approches. Cependant, l'album reste cohérent de bout en bout. Malgré quelques inspirations moins senties, il est porté par une furie contagieuse et une volonté d'explorer toutes les facettes du bruit qui rafraîchit les tympans tout en les martyrisant délicieusement.

SKX (16/11/2017)