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Destruction Unit
Negative Feedback Resistor – LP
Sacred Bones 2015

Sur l'immense poster inclus dans le vinyle, il est écrit en grand que Destruction Unit a Sacrified their ears to make this album as loud of a statement as possible. Will you lend them yours ? Et au verso de la pochette, il est également précisé New American Heavy Underground. J'avoue ne pas connaître grand chose de ce groupe basé dans l'Arizona. Negative Feedback Resistor est même ma première expérience sérieuse avec Destruction Unit dont la discographie comporte déjà six ou sept albums avec des formules et des line-up différents (leur fait de gloire étant que feu Jay Reatard ait joué avec eux au tout début, enfin surtout avec Ryan Rousseau, tête pensante et seul membre d'origine de cette unité de destruction). Mais ces citations donnent particulièrement envie d'en savoir plus et d'en découdre avec ce groupe dont la réputation de jouer immensément fort est même parvenue jusqu'aux oreilles des sourds.
Et dans le gros bordel, ils sont effectivement doués. Je veux bien qu'on taxe cette musique de psychédélique mais c'est avant tout très punk. Ou alors le psychédélisme à la Nicoffeine, plus faiseurs de bruit que fumeurs de joint. D'où sortent des mirages auditifs plutôt que des volutes de fumée. Et le principal responsable de cette attaque en règle, c'est le batteur propulsant sans cesse la machine dans les flammes de l'enfer comme s'il avait justement le feu au cul. Jamais il ne se repose (ou si rarement) et Negative Feedback Resistor prend une tournure de folle équipée sauvage au pays du feedback, du larsen, de la monstrueuse reverb, des pédales d'effets plus nombreuses qu'une armée de zombies et de synthés qui font autant de fatras que les guitares. D'ailleurs, il est impossible de départager les cordes et les machines. Cinq types sont à l’œuvre plus quatre invités dont un saxophoniste (Alex Zhang Hungtai) perdu pour la cause car à l'heure qu'il est, j'essaye toujours de le distinguer.
Comme on dit couramment chez Rocco Siffredi, Destruction Unit envoie la sauce. Un riff de guitare saignant sert de bouée de sauvetage et dirige le chaland dans le dédale abstrait des motifs de guitares/machines/effets qui tapissent le fond, s'intercalant dans le moindre espace. Le chant de Ryan Rousseau rajoute une couche de colère. Le batteur, vous savez déjà ce qu'il fait. La débauche guette à chaque coin de rue.
Mais faut pas exagérer. C'est loin d'être inaudible non plus. Je ne sais pas d'ailleurs par quel miracle c'est possible. Sans doute dans l'aménagement de quelques plages de repos, comme un long blues agonisant (une partie de Chemical Reaction/Chemical Delight et d'autres débuts et fins de compositions ressemblant à des drones annonciateurs de futurs tempêtes), un psychédélisme qui prend des airs de shoegazing avec des santiags (si Ride avait été élevé dans le désert américain, on se serrait quand même vachement plus marrer), des vagues de bruits où un semblant de sentiments pointent le bout de ses rayons. Car Negative Feedback Resistor donne l'impression de foncer tête baissée dans la destruction et que tout finit un peu trop par se ressembler tout au long des huit morceaux. Manque de relief pour une mise en abîme plus pertinente et accroître l'efficacité d'un disque qui en comporte déjà pas mal. Parce que dans l'ensemble, c'est un album radical, un rock primaire se tapant des convenances et flirtant avec le chaos, qui les aiment les suivent mais ce qui est sûr, c'est que je ne leur prêterais jamais mes oreilles. Qu'ils se démerdent.

SKX (11/11/2015)