xiuxiu


Xiu Xiu
The Air Force - LP
5 Rue Christine 2006

C'est un peu beaucoup toujours pareil un album de Xiu Xiu. Si ils continuent comme ça, on va finir par les traiter de Lungfish. Alors qu'en fait non, c'est vraiment pas pareil. Il faut aimer l'amour du détail. Et dans Xiu Xiu, du détail, il y en a à la pelle. James Stewart, l'âme damné du groupe, aurait dit un jour qu'il voulait faire comme son idole Morrissey, sortir un album tous les ans, comme The Smiths à leur grande époque. Ne change pas de main Jamie, je sens que ça vient. Sauf qu'à force, on a fini par s'habituer au monde étrange de Xiu Xiu. On trouverait ça presque banal. Une écoute distraite et The Air Force pourrait passer pour un ersatz de n'importe quel autre album de Xiu Xiu. C'est le cinquième album en cinq ans (Knife play (2002), A Promise (2003), Fabulous Muscles (2004), La Forêt (2005) auquel il faut rajouter un album live, une compilation (Fag Patrol), des projets annexes (XXL, Grouper) et un semi-remorque de 45 tours, split ou non. Et comme d'habitude, plusieurs écoutes vont nous convaincre que The Air Force est du Xiu Xiu pur jus mais unique en son genre. Il va être question de The Smiths encore. Stewart s'est dit (à nouveau) obséder par l'écoute de The Queen is Dead pendant la tournée qui a précédé cet album. Une obsession à laquelle il faut rajouter une écoute répétée du 1er album de Weezer (!!). D'où un album plus pop. Pop à la Xiu Xiu s'entend. Et dansant (remplacez le pop de la phrase précédente par dansant).
La toute première fois que j'ai écrit et enregistré une chanson de Xiu Xiu, je suis allé tout seul dans cette boite de nuit horrible à San Jose, en essayant timidement de ramener quelqu'un à la maison. C'était la nuit de Noël, c'était pathétique et je suis rentré tout seul. La raison d'être Xiu Xiu vient de ce sentiment de se sentir seul et stupide, d'aller quand même danser tout en sachant que cette musique dansante magnifie ta solitude et ta stupidité.
The Air Force retranscrit à merveille ce sentiment. Jamais un album de Xiu Xiu n'a été aussi mélodique et dansant. Mais je vous mets au défi de siffler sous la douche et danser sur n'importe quels des onze morceaux de The Air Force. L'album le plus doux mais jonché d'écorces. Dans le milieu, Stewart passe facilement pour être le mec le plus glauque, le genre de type à écouter The Smiths et Joy Division en boucle tout en lisant je ne sais quelle poésie adolescente torturée. Je suis sûr que je ne tiendrais pas une journée entière sans vouloir lui en coller une. Heureusement, je n'ai que ces disques à me taper. Mais tout ça fait partie intégrante du paysage. Le bonhomme, son vécu, pas jouasse à ses dires, toutes les paroles issues de son expérience personnelle, sa rage aussi contre le monde de Bush (sa chanson Saturn sur La Foret parlait de violer Bush jusqu'à la mort !). Il met tout ça dans ça musique et il en ressort cette fois-ci quelquechose d'un peu plus léger qu'à l'accoutumée. Même son chant semble plus en paix. Greg Saunier (batteur de Deerhoof) est aux manettes de la production et a réussi à fluidifié l'incroyable bêtisier à instruments de Xiu Xiu, rendre le collage de bruits, de notes semblant tombées au hasard plus cohérente. Xiu Xiu apprivoise son bazar qui faisait toute la différence mais c'est au profit de chansons plus identifiables. Caralee McElroy compose et chante son propre morceau (l'aérien Hello from Eau Claire qui nous renvoie à Young Marble Giants). Stewart ne peut s'empêcher de gros coup de blues comme le très sombre P.J. in the streets of London (un hommage à PJ Harvey ?). C'est pas encore demain qu'on dansera saoul comme des vaches sur les tables avec Xiu Xiu. Il manque des morceaux aussi percutants que Sad Pony Guerrilla Girl ou I Luv the Valley OH! mais The Air Force fini par nous ensorceler. Fidèle à son rythme de stakhanoviste, le sixième album est prévu pour janvier 2008, a pour nom Women as lovers et il se susurre que Michael Gira (Monsieur Swans) figure au générique… Vous n'avez pas fini d'entendre parler de Xiu Xiu !!

SKX (12/12/2007)