<08|11|2011> On
a dur (2ème partie)
Faut
oser appeler son groupe Tropics
& Meridians, soit un des albums les plus brillants de June
of 44. Mais à Blois, on a peur de rien et leur premier 7 titres
self-titled et auto-produit en 2010 brandit l'étendard du mouton
de Panurge avec fierté. Syndrome post-rock instrumental avec des
samples et des Microfilm,
qui a tout dit des milliers de fois et surtout le dit sans passion. Respecte
trop les anciens. N'arrive pas à dépasser l'amour qu'ils
portent à leurs disques de chevet. Rien ne bouge. Surtout ne rien
bouger. Et c'est bien dommage parce qu'on sent malgré tout qu'il
ne faudrait pas grand-chose pour un début d'incendie, qu'on aurait
sans doute pas de mal à circonscrire mais ça serait déjà
ça. Un titre comme Epptigg, plus nerveux ou Grascole,
comptent ses bons moments, alertes et enlevés mais c'est pour à
chaque fois retomber dans des plans lénifiants comme le titre de
clôture Open Field et en gros, tout le reste.
A
Tant Rêver du Roi est un label apprécier par ici. Mais
Semi
Playback ne foulera plus jamais les terrains locaux une fois
cette chronique torchée de leur Top 14 Album. Le joli
digipack cartonné sera gentiment rangé dans une pile qui
prend la poussière. Semi Playback, duo au sud de La Loire (on
ne prend pas de risques comme ça) qui, parait-il, fait du math-rock
avec une guitare et une batterie. Le seul problème - et il est
de taille - c'est qu'on entend que le synthé bontempi, une sale
sonorité de jeux vidéos comme un putain de moustique qui
vous tourne autour des oreilles mais belle bête. Du coup, on a
même plus envie d'écouter le reste, malgré un batteur
qui a l'air de taper juste, plus envie de supporter cette musique qui
a en plus le toupet de simuler le bonheur.
Autre
groupe qui a chopé le syndrome du synthé, No
Drum No Moog. De petits plaisantins puisque dans ce duo, il
n'y a qu'une batterie et un moog. Deux moog pour être précis.
Là, c'est plus un moustique mais une nuée. Et je suis
allergique. Deux types qui ont un casier au sein de Aghostino, Drain
Pump Booster et Beeswax. Ca vous aide pas dans la vie. Un duo batterie-synthé
Bordel, je fais quoi avec ça, moi ? On qualifie leur album Monomur
(Le Kit 2011) d'electro-disco-rock
pour être politiquement correct ? On se dit que Marvin n'a pas
fait que du bon pour le rock hexagonal ? Parce qu'il est fort à
parier qu'on va en voir de plus en plus de groupes dans le coin avec
des fichus synthés/korg/moog qui essayent de faire danser. Un
groupe osant en plus faire une reprise de Sloy (Old Faces), c'est
moins 100 points d'office. Ils ont beau essayé de mettre un peu
de chant, d'inviter une copine pour pousser la chansonnette, de craquer
et mettre une guitare acoustique sur un titre, c'est juste pas possible.
Je passe mon tour.
Allez,
un peu de tendresse et de simplicité. Cornflakes
Heroes et leur troisième album Hum (Greed
records 2011). Comme pour leur deuxième
disque, ce groupe qui se partage entre la capitale et Caen, n'est pas
très fort sur la pochette. Mais, toujours comme pour le deuxième
album, ils sont très forts sur la musique pop enthousiaste, revigorante
et qui ne sonnent pas mièvre. De l'indie-pop-noisy à la
Pavement, avec une pincée de Kinks et de Violent Femmes et bien
plus que ça tout en étant différent. Je crois que
c'est clair. Clair que ce n'est pas ma tassé de thé quotidienne
mais force est de reconnaître leur talent pour écrire de
subtiles morceaux nerveux et des tubes irrésistibles comme In
My Rags.
Il
est clair également que les dijonnais de Myrna
Minkoff n'ont pas tout mis leur inspiration au service de la
pochette de leur album We're On Strike (Movement for the 21st Century),
sorti en septembre 2009 (c'est qu'on n'est pas en avance !), par leurs
propres moyens. Mais comme pour Cornflakes Heroes, ce disque a quelquechose
d'attachant, dans un registre largement plus rock, noisy/noise et saignant
comme le titre System Requirement. Les douze morceaux manquent
sans doute de personnalité, de folie et d'une inspiration plus
forte que la moyenne pour les sortir de l'ornière de la masse
discographique qui pullule sur le réseau, qu'il soit en chair
et en os ou virtuel, mais quand ce CD s'enclenche dans la machine, je
n'arrive jamais à le zapper avant la fin. Plutôt bon signe.
Par
contre, un que j'arrive facilement à zapper, c'est l'album de
Hermetic Delight.
Un nouveau groupe de Strasbourg qui cite Electric Electric dans leur
bio mais leur 6 titres Universe Like Thousand of Red Alternatives
est loin de posséder le même piment. Malgré le beau
brin de voix de la chanteuse, leur rock vaguement noisy est trop convenu,
trop lisse, trop propre pour éveiller le moindre soupçon
d'intérêt. Mortel ennui.
Question
ennui, Fragment.
en connaît un rayon. L'ex-collègue Haz avait dit pas mal
de bien du split Fragment.
/ Iroha. J'étais loin d'être d'accord mais c'était
bon d'avoir autre chose que la Pensée Unique sur Perte &
Fracas. Retour donc au dictatoriat et du crachat de glaviots sur Jesu
et tout ses disciples. Le metal shoegaze de Justin Broadrick a multiplié
les petits et Thierry Arnal, l'homme qui se cache derrière Fragment.
figure en bonne place sur la liste. Deux énormes titres, énorme
par la quantité, vous l'aurez compris, chacun versant sa miséricorde
entre vingt et trente minutes. Home I n'est pourtant pas totalement
rédhibitoire, grâce à une boite à rythme
suffisamment plombée, et une ambiance qui arrive parfois à
tirer des desseins sombres et épais. Mais les vocaux éthérés,
les nappes de guitares qui n'en finissent pas de taper dans le vide
et le sentiment général vaporeux viennent facilement à
bout de ma résistance. Sur Home II, malgré l'apport
de Nicolas Dick (Kill The Thrill) à la guitare et aux loops et
dont on reconnaît la patte (il a masterisé le disque également)
ne sauve pas Home (OPN
records 2011) de l'ennui et du platonique. C'est même pire
puisque aucune rythmique ne secoue l'édifice qui, à l'image
de la pochette, semble irréel. Ou, pour être plus juste,
qu'on n'aimerait jamais entendre.
Anorak
est un nom rigolo pour un groupe velu et hardcore. Parce qu'à
la base, dans les années 80, Anorak était associé
au terme pop et désignait tous ces groupes anglais mièvres
et acidulés. Le terme est toujours d'actualité. Notre
Anorak du jour s'enfile à Amiens, n'a rien de mièvre et
est un produit de grande consommation. Leur deuxième album se
nomme Sick (Basement
Apes Industries, Swarm
of Nails et Maximum
Douglas, 2011) et ça fait bien longtemps que ce genre de
musique ne rend plus malade. Le style Converge / Coalesce / Botch en
a laminé plus d'un. Malgré tout le savoir-faire et la
conviction d'Anorak à vous tailler une veste pour l'hiver, vous
labourer les chairs, multiplier les rythmes, trouver des riffs épiques
et acérés, Sick ne décolle jamais. Anorak
a la coupe impeccable mais ça ne me fait plus ni chaud ni froid.
Question
veste, Alkalys
n'est pas rancunier. Il s'en était pris une belle lors de la
dernière humeur
massacrante. Ils persévèrent et renvoient leur nouvel
objet de délit, A Pack Of Lies (Basement
Apes ind. 2011). Le groupe a depuis évolué. Changement
de personnel, passage au tout instrumental (ou presque), ce qui représente
sûrement leur meilleure idée à ce jour, vu le niveau
affligeant des paroles de l'album passé. Le trio normand a donc
abandonné sa musique de cul béni pour partir dans une
direction bouchonnée comme l'autoroute du sud en plein mois d'août,
celle du post-rock metal à la Isis, Cult of Luna. Au moins cette
fois-ci, le ridicule ne les tuera pas. Et donc l'originalité
non plus. Tout comme pour Anorak, ce manque de personnalité n'est
pas un problème en soi. Peu de groupes peuvent se vanter d'en
avoir une bien trempée (de personnalité, j'en voyais déjà
qui gloussait), tous styles confondus. Quand le frisson de l'émotion
arrive à passer, on peut toujours y croire. Et la force de l'interprétation
fait le reste. Le problème d'Alkalys, c'est que même là,
ils défaillent. Alkalys récite bien trop parfaitement
tous les poncifs du genre pour faire passer le moindre sentiment, qu'il
soit bon ou mauvais. On s'assoit, on écoute poliment et puis
rien. Strictement rien. C'est propre, affreusement sage. Ils vont croire
que je m'acharne mais la copie est plate et sans âme. Ils ont
essayé les drogues dures ?
Un
autre groupe qui s'acharne à envoyer toutes ses productions,
c'est les vieux de la vieille de Burning
Heads. Leur 142ème album s'appelle Hear This (Opposite
Prod. 2011) et non, merci, je n'ai toujours pas envie d'entendre
ça. Je n'ai jamais été client de punk-rock mélodique,
je pourrais même devenir méchant, c'est dans ma nature,
j'y peux rien. Et encore, on n'a pas le droit aux morceaux à
consonance reggae-dub (quoique le dernier, Rue Buffon, est limite)
parce que là, je sortais définitivement les flingues.
Car je rappelle la règle de base : un bon joueur de reggae est
un joueur mort. C'est valable aussi pour les joueurs de djembés.
Ou le rock progressif que même un attardé mental ne voudrait
pas.
Pharaohs
sont beaux, sont jeunes, sont anglais et posent leurs charmantes têtes
de rosbeefs sur un socle en bois pour mieux se faire tirer dessus. Leur
premier album Photosynthesis vient de sortir sur Hip
Hip Hip et la dernière chose qui viendrait à l'esprit,
c'est de rajouter Hourra ! Ils appellent ça du math-pop. Oublier
les maths, concentrez vous sur la pop. Une pop nerveuse et un brin anguleuse
certes mais surtout très sucrée, et fraîche comme
un désodorisant toilettes. Ca sent le produit de synthèse,
un produit calibré pour caresser dans le sens du poil et un chant
où tu entends le sourire derrière, c'est insupportable.
Chez nous, on a Alaska
Pipeline qui a su ne pas passer du mauvais coté de la ligne
blanche. C'est largement suffisant.
Je
ne sais pas pourquoi mais je le sentais super bien cet album de Atomic
Paracelze (Records
Invaders, 2011). Le digipack qui présente bien, la gueule
de la pochette, bref, un gros moment d'égarement. Ce groupe suisse
présente sa musique comme étant No-guitar-avant-rock.
Si vous pensez à une réincarnation de leurs compatriotes
d'Alboth!, vous vous fourrez le doigt dans l'il jusqu'au trognon.
Moi le premier. Bouillie aussi infâme que prétentieuse
et indigeste de prog-rock-jazz-core-klezmer-pro Patton, pas le général
mais l'affreux gominé qui se tord dans Faith No More et Mr. Bungle.
Changement de plans tous les deux secondes pour le simple plaisir du
changement, et puis après ? Dire que la ville de Genève,
le canton de Fribourg, les communes de Bulle et Versoix leur ont filé
du fric pour ça. Les Suisses ont vraiment de l'argent à
foutre par les fenêtres.
Un
petit mot accompagnait Chansons pour une émotion ou cent,
le premier album de M.
Laplaine (Les
Sangliers Associatifs, 2011). Aurez-vous le courage d'écouter
ce disque ? Piqué au vif dans mon orgueil, j'ai ouvert ce
digipack au péril de ma vie et j'ai instantanément regretté
mon geste de preux chevalier toujours prêt à défendre
la noble cause des petites gens. Fontainebleau ne saura désormais
plus seulement connu pour sa forêt majestueuse mais aussi pour
M. Laplaine, ses recueils de poèmes à la plume alerte
et cocasse, n'ayant pas peur de mettre en musique un poème de
Baudelaire et offrant toute sa générosité dans
une musique qui va révolutionner la chanson française.
Là encore, de l'argent jeter par les fenêtres de personnes
qui, à part la page contact, n'ont jamais dû parcourir
ce présent zine.
Enfin,
gardons le plus luxueux pour la fin. Quand on parle de classe et de
glamour, on pense toute de suite à l'Italie et Monica Belluci
(que nous traduisons ici par Monique Belouche, c'est vrai que ça
fait tout de suite moins glamour). Luxueux digipack double CDs du groupe
DEC dont l'album
Superimposing Memories (Terramiamusic
2011) impose toute sa grandeur et sa mansuétude. Je ne souhaite
même pas cette musique à une galerie marchande. Et encore
moins à nos amis italiens et italiennes qui ont déjà
beaucoup à faire en ces temps de crise.
Comme disait
le célèbre philosophe Franck Ribéry, un midi de
détresse sur un plateau de télévision en Afrique
du Sud : On a dur.
Tête
de Gondole (08/11/2011) <
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