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Drive With A Dead Girl
Reign Falls - LP
Tandori, En Veux-Tu ? En V'là !, Quelque Part records 2017

Une chronique très tardive d'un disque publié un an plus tôt pour la simple et bonne raison que je pensais que ce disque n'existait pas dans la vraie vie. Et si tu n'existes pas dans la vraie vie en vrai, tu n'as pas le droit de citer, tu erres à jamais dans le monde virtuel comme une âme en peine dans un purgatoire où tu ne peux trouver le repos. Quelle ne fût donc pas ma surprise, lors de la venue des Lillois le 23 février au Marquis de Sade à Rennes avec Delacave, de constater à la fin du concert que Reign Falls avait vu le jour en vinyle ! Avec en plus le logo du label rennais crapoteux Kerviniou Recordz (même si en fait c'est pour de faux, c'est juste de l'amour). Il serait donc dommage de ne pas causer du neuvième album de Drive With A Dead Girl parce que d'une, on ne parle pas assez de ce groupe qui mériterait pourtant une exposition plus grande. Et deuxièmement, on les adore, eux et leur petite musique singulière.

Si vous avez raté les épisodes précédents et que vous ne pouvez vivre sans repère dans ce monde incertain, la situation du quartet lillois pourrait (notez bien l'utilisation du conditionnel) se situer au point de rencontre de Cocteau Twins et de Sonic Youth avec la fureur de vivre d'un Codeine. Un slow-core délicatement noisy, un post-punk froid et rêveur, du noise-rock polaire, du shoegaze pour regarder encore plus bas que ses pieds ou en fait, non, plutôt regarder vers un horizon se dessinant très au-dessus du commun des mortels, planant dans un état cotonneux et écorché vers des rivages que seul Drive With A Dead Girl peut atteindre.
Reign Falls ne déroge pas de leur ligne de conduite qui les voit évoluer depuis 2006 sur le fil du rasoir entre des stalactites pouvant tomber à n'importe quelle seconde comme des couperets aux conséquences indécises. Drive With A Dead Girl peaufine, cisèle, de plus en plus sûrs de leur déséquilibre inné. Hijra est un bel exemple d'une écriture devenue fine, maîtrisée, enlevée. Un titre concis, eux (et elle !) aimant s'épancher habituellement au-delà des cinq minutes, avec une mélodie froidement belle s'envolant dans des volutes noisy, un rythme plus énervé que la moyenne et le chant à fleur de peau d'Alexia.
Les six autres compositions (JHH ne figure pas sur le vinyle, uniquement sur bandcamp) sont au long cours, font monter l'adrénaline patiemment, se brisent comme du cristal, racontent des histoires dans un langage inconnu, tiennent sur un fil, dans un souffle mais arrivent toujours à se montrer consistantes et prenantes au final, faisant preuve d'un univers éminent troublant à l'instar des réussis The Low Flying Swan ou Reign Falls. Parfois, l'atmosphère devient bizarre, veloutée comme sur Horizons ou décalée, voir bancal (Boogie Man), tout le paradoxe de Drive With A Dead Girl qui finit toujours par retomber sur ses pattes. Sur les huit minutes de Slow Mobile, la douce sonorité de ce qui ressemble à un accordéon se fait entendre. Les deux guitares gorgées d'effets sèment le bruit, épaississent le brouillard tout en laissant passer de magnifiques raies de lumière.
Le charme de Drive With A Dead Girl opère à nouveau. Offrez-vous une parenthèse et si vous n'avez pas encore eu l'occasion, découvrez ce groupe pas comme les autres.

SKX (03/04/2018)