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Malaïse
Hearts Of Darkness – LP
Acide Folik / Deviance / Donnez-moi Du Feu / Disques de la Face Cachée / Et Mon Cul C’est Du Tofu ? / Tendresse 2016

Bon je les vois déjà venir de loin les grincheux qui vont me dire que Malaïse est un groupe beaucoup trop référencé pour être réellement intéressant. Je pense très exactement le contraire. Je résume donc la situation : Malaïse est un trio (ils sont quatre désormais, si j’ai bien tout compris) pratiquant le post punk comme on va aux gogues (c’est-à-dire tous les jours dans le meilleur des cas) avec une chanteuse qui vocalise allègrement comme Suzette, du flanger dégoulinant à tous les étages, des compositions toutes plus sombres les unes que les autres (ou presque) – ah et puis merde à la fin, vous me faites chier. C’est vrai quoi, qu’est ce qu’on en a à foutre ? Rien et mille fois rien. Je reconnais que les bâtards des années 80 ce n’est pas ce qui manque mais ce n’est pas une raison pour tous les mettre dans le même sac. Malaïse me semble bien être largement au dessus du lot des astiqueurs d’égo patenté en mélancolie morbide et dont la plus grande qualité est de se ridiculiser à grands coups de poncifs mal digérés. Non, la grande force du groupe c’est de ne jamais oublier que dans cette dénomination aussi hideuse qu’ignoble de « post punk » il y a le mot punk. Tu comprends enfin ce que je veux te dire ?

A l’origine duo, Malaïse a définitivement incorporé dans ses rangs un guitariste talentueux et versatile (échappé de The Austrasian Goat, 14:13, Death To Pigs et des regrettés Neny Hellkin, entre autres) qui rejoint ainsi un batteur incroyable (Death To Pigs également mais aussi ancien bassiste de Strong As Ten, désormais batteur pour Zone Infine, etc.) et une chanteuse/bassiste tout simplement merveilleuse et unique (et frontwoman explosive de The Buttshakers). Au delà des qualités évidentes d’un tel line-up et au delà du descriptif plutôt lapidaire de la musique du groupe exposé dans le premier paragraphe de cette pauvre chronique, on peut affirmer que Hearts Of Darkness dynamite sans difficulté le niveau du premier LP, tout simplement parce que les guitares y prennent une part beaucoup plus importante et propulsent littéralement toutes les compositions de l’album. Certains regretteront peut-être le coté bricolo / salle de bains des premiers enregistrements mais tant pis pour eux.

On ne peut donc que saluer la variété des couleurs et des nuances proposée par un album bien moins monochrome et bien moins monotone que l’on pourrait le croire au départ. La tonalité générale est peut-être très dark façon fées mortuaires en pleurs mais nombre de titres offrent quelque chose de différent : The Screen à la limite du sautillard, Dreaming dont je me demande à chaque écoute si le début des paroles ne serait pas un hommage sans fard au 1969 des Stooges, Dance All Night et sa légèreté presque pop ou Hearts Of Darkness, hymne tribal et rehaussé d’une basse dub, sorte de croisement on ne peut plus réussi entre The Slits et Bauhaus… Hearts Of Darkness est plus cohérent mais aussi plus magnétique, envoutant. Moins de brume rampant au niveau du sol et moins de clair-obscur au travers de frondaisons vaguement inquiétantes mais plus de respiration, plus de circulation d’air (toujours frisquet, cela va de soi) et donc une formidable dynamique au service d’une identité forte et assumée. Et puis cet artwork crypto-gothico-cabalistique qui devrait séduire les émules de Douglas Pierce me plait aussi énormément, heilege !

Hazam (05/12/2016)