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Adolyne
Of Ash/Of Shit/Of Shame - LP
No List 2015

Une chronique sur le tard d'un album publié en juin 2015. Mais vous savez bien que chez Perte & Fracas, on n'est pas aux pièces, on prend le temps de vivre, d'apprécier la bonne chaire et bien qu'on ne donne pas notre part au chien, il est difficile d'aller aussi vite que la musique qui coule comme d'un robinet en fuite perpétuelle.
Adolyne est originaire de Saskatoon, dans la province de l'ouest canadien Saskatchewan (-50° l'hiver, +40° l'été, bulletin météo terminé) et je crois bien que si ce groupe a fini par attirer notre attention, c'est pour la présence de Skot Hamilton, le bassiste sur le dernier Ken Mode, qui a ici un rôle plus central avec le chant principal et la guitare.
Of Ash/Of Shit/Of Shame. Des cendres, de la merde et de la honte, c'est un joli programme. Occasionnellement, c'est leur troisième album après I'm Walking the Red Carpet, Motherfucker en 2007, et Swinedive en 2009. Et Ken Mode, il n'en est pas uniquement question pour une histoire de membre en commun. Le socle musical est identique. Avec une bonne couche de Botch, Playing Enemy et Deadguy, bref, de quoi voir venir pour l'hiver et offrir de très solides fondations. Les éléments noise-rock, post-hardcore et metal s'imbriquent à la perfection. Le jeu est riche et varié comme les ambiances tour à tour frénétiques, haineuses, violemment poignantes, sombrement mélancoliques et subtilement mélodiques.
L'album commence d'ailleurs de façon surprenante par A Recurring Zero, un instrumental uniquement composé d'un violon et d'un piano. Ce n'est bien sûr pas la composante principale de ce troisième album mais Adolyne a bien compris que pour magnifier sa violence, mettre en valeur ses monstrueux coups de butoir et plus généralement, arriver à tenir l'auditeur en haleine jusqu'au bout sans le perdre en route dans ce dédale d'enfer jalonné de convulsions multiples, il valait mieux savoir tempérer ses ardeurs et proposer des pistes de sombres accalmies qui ne sont pas de vulgaires interludes (Moist Pennies ou When Guilt Is The Only Muse). Quand ce n'est tout simplement pas à l'intérieur d'un même morceau comme le contrasté Automatic Writing. Ça débute comme du Neurosis en mode beauté noire avant que la tension ne monte d'un coup et que la compo s'emballe dans une grande gerbe épique et passionnément intense puis retombe soudainement pour laisser paraître une nouvelle fois l'archet du violon s'achevant sur une dernière flambée de sauvagerie.
Adolyne maîtrise parfaitement son sujet. Les ficelles ne se voient jamais. Les titres uppercuts s’enchaînent sans forcer avec les compositions plus longues et ambitieuses (avec en point d'orgue les neuf minutes épiques de Brawler's Fracture avant le clap de fin). Le chant participe lui aussi à cette impression de diversité. Il fait corps avec la musique, module les effets, est régulièrement secondé par les voix des trois autres musiciens et surtout, il fait passer dans les bronches un sale goût de pression, une infernale rage comme s'il avait vu la queue du diable. Adolyne ne propose donc rien de franchement nouveau à l'horizon des grandes prairies mais le résultat est bluffant. Rien de merdique, rien de honteux. Par contre, finir en cendres consumer de l'intérieur ne serait pas surprenant.

SKX (14/10/2016)