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Sofy Major
Waste – LP
Solar Flare records 2015

Autant le dire tout de suite, j’ai vraiment eu du mal à rentrer dans ce troisième album de Sofy Major. Et sur le moment j’ai trouvé cette sensation très désagréable parce que, hormis les tout débuts du groupe (mais il faut bien commencer, hein…), j’ai très souvent été fan des clermontois et de leur noise hardcore teinté de stoner. Que se passe t-il donc avec Waste ? La réponse n’est pas très difficile à trouver, je peux même dire qu’elle m’a sauté aux oreilles : je déteste le mix surgonflé de cet album qui met en valeur un son de caisse claire difficilement supportable et qui, surtout, met beaucoup trop en avant le chant du bassiste. Pour enregistrer cet album Sofy Major a pourtant mis les moyens tout en jouant la prudence. On se rappelle que pour le précédent album Idolize, Sofy Major, qui avait alors prévu d’enregistrer à Brooklyn chez Andrew Schneider, avait débarqué à New York en même temps que la tempête Sandy, le groupe y avait perdu tout son matériel, avait failli y laisser sa peau mais le projet avait pourtant abouti, dans un autre studio, avec du matériel prêté par des musiciens amis, pour le résultat que l’on sait. Pour Waste, Sofy Major a fait exactement l’inverse en enregistrant en France au studio Black Box mais en faisant venir pour l’occasion Dave Curran (Pigs, Unsane) pour produire le bousin tandis que le mix a été assuré par Andrew Schneider resté prudemment à la maison et le mastering par Carl Saff, comme précédemment. Sur le papier, Waste avait donc tous les atouts en mains pour être une nouvelle tuerie.

Alors pourquoi je trouve Waste en deçà de ce qu’il aurait du être ? Cette histoire de son ? Pas seulement. Si effectivement il faut faire abstraction de cette maudite batterie et donc de cette caisse claire qui sonne horriblement mal à mes oreilles peut-être un peu trop délicates et un peu trop fragilisées avec l’âge, il faut aussi se résoudre à encaisser un chant plus appuyé et plus… ambitieux (non, je n’ai pas écrit « putassier »). Entendez par là que si le chant n’abandonne pas ses allures testostéronées, il monte aussi en grade question mélodicité et accroche-chœurs. Et ça, ça passe beaucoup moins bien. Plus généralement, il est clair que, sans se renier, Sofy Major a mis du lubrifiant 3000 dans sa mécanique et a lustré les chromes. L’effet aurait pu se révéler séduisant mais moi j’aime la crasse, la boue, la sueur et le sang or Waste, malgré une collection de riffs toujours aussi impeccables voire impressionnants, a perdu un peu de tout ça. Et pourtant, à chaque fois que je réécoute ce disque, je me dis qu’il ne lui aurait pas manqué grand-chose pour se hisser à la hauteur de ses prédécesseurs et voire même les dépasser. Mais le ver est dans le fruit et, alors que certains titres démarrent de la meilleure façon qui soit, il y a toujours quelque chose qui finit par clocher à un moment ou à un autre (souvent les refrains d’ailleurs, trop systématiques à mon goût) et gâcher mon petit plaisir égoïste.

Et puis il y a une dernière chose qui me chiffonne. Pour Idolize, Sofy Major avait choisi d’incorporer une reprise de Portobello Bones. Sur Waste, on découvre à la fin du disque une reprise des Thugs, As Happy As, tirée de l’album As Happy As Possible, c’est-à-dire un album où les angevins commençaient sérieusement à devenir pénibles – en bon extrémiste, j’aurais préféré un titre de la Sainte Trilogie Electric Troubles/Dirty White Race/Still Hungry, Still Angry. Comme pour l’original, cette version de As Happy As comporte un chant clair et, surtout, elle n’apporte strictement rien à la version des Thugs. Par contre elle éclaire tout l’album d’une lumière peu favorable, celle du râteau dont on se sert pour ratisser un peu trop large mais aussi celle du râteau que l’on se prend en pleine tête parce que l’on a malencontreusement marché dessus. Waste est donc l’album de Sofy Major que j’aime le moins… Mais cela ne m’empêchera pas d’écouter le prochain.

Hazam (30/11/2015)