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furne
smalltones


Café Flesh
Lions Will No Longer Be Kings - CD
Head/Furne/Smalltones 2012

Vive la Charente libre s'écriait le Général de Gaulle, un jour où le pineau avait débordé des caves. C'est quoi ce coup de Trafalgar en plein Jarnac aurait répliqué un opposant monomaniaque. La Charente, l'autre pays des vaches à cornes et des ânes bâtés, sort son bétail du Café Flesh.
Le chef du troupeau enregistrant le cri de ses animaux en rut se nomme Miguel Constantino. C'est un fameux coup de pic. Le Café Flesh s'éclaircit, les néons s'illuminent sous une vraie lumière noise-punk-rock fiévreuse là où le précédent parlant d'épouse et de chien ressemblait à de la bave d'escargot au regard de cette nouvelle donne. Ça claque sur le comptoir. Fini le gras et la merde aux pieds, Café Flesh ne garde que le nerf. Mariage enfin réussi entre les aspirations noise, affiliation Chicago, la sudation rock'n'rollesque et les émanations éthyliques. Le ruisseau ne charrie pas que des boeufs. Faut écouter swinguer cette section rythmique sur Crackpot et God Bless the Devil. Un bon coup de queue sur le dos des vaches et les mouches partent. La caisse claire est tout sourire, la basse est brûlante, le groupe tend son obole à Jesus Lizard sur le début de Girl's Freak puis divague parce que c'est encore ce qu'il sait faire de mieux. Pour tendre vers l'excellence et décrocher le premier prix du meilleur produit du terroir de l'année, Café Flesh a son arme secrète. Un chanteur extraverti et son attirail cuivré (baritone saxophone et alto saxophone). L'étincelle qui fait flamber rouge. L'explosion sous l'autel rock. Café Flesh se transforme en orchestre suintant de chaleur, en bouge surchauffé mais toujours tendu, débordant de partout mais débarrassé de tout superflu. Thomas Beaudelin explore la profondeur de ses cordes vocales, les martyrise dans tous les sens, fait son Captain Beefheart ou son Tom Waits, éructe, crache et trouve le temps de souffler dans ses engins rutilants, leur trouvant enfin une place soyeuse dans la panoplie rock de ses petits camarades de jeu. C'est d'ailleurs tout le groupe qui semble avoir trouver ses marques, l'osmose parfaite, les compos qui flinguent. Le guitariste (Jérôme Bossuyt) est dans une forme olympique, ravage la faune charentaise sur des riffs atomiques et pas dénués de tonnes de finesse entre deux explosions. Je n'imaginais pas Café Flesh capable de donner un tel reflet à leur énergie anarchique, canaliser leurs mauvaises manières sans édulcorer le propos. C'est tout à leur honneur d'avoir enfin sorti l'album de rock dont la Charente n'a rien à foutre mais que le reste du monde civilisé est heureux de se prendre dans la face.

SKX (19/06/2012)