onelickless

One Lick Less
& We Could Be Quiet - LP
Gheea Music/Ocinatas/Gabu 2011

Architecture imaginaire, petit coquillage compliqué, c'est la pochette qui a d'abord interpellé. Monde de faux-semblant. Comme ces peintures en trompe l'oeil que l'on pense vrai au premier regard sauf que là, c'est l'inverse. Ce n'est pas un graphisme ou montage né d'un ordinateur tout confort mais bien une photo de la vraie vie, en l'occurrence une photo d'un fragment de bâtiment (une église ?) prise à Strasbourg, que l'on doit à Alexia, la même personne, assurément douée, à qui on devait la pochette du split Xnoybis/Pord et l'album Meanwhile de Xnoybis toujours.
Halo de lumière en noir et blanc captant une musique tout aussi insaisissable. Grand fond de lame rayonnante, & We Could Be Quiet est ce genre d'album qui vous éclaire étonnamment alors que vous étiez tranquillement au fond de votre trou à écouter les sempiternelles mêmes choses en boucle. Nuance de gris pour rendre encore plus complexe une approche qui s'en remet au final qu'à l'émotion, mot galvaudé mais qui prend tout son sens ici. Car on peut toujours se raccrocher aux branches comme à cette guitare slide, cette batterie sans grosse caisse, le fabriqué maison, ces relents de blues, ces grandes étendues fantomatiques, ce faux-air de post-rock ou de math qui rock comme un Cheval de Frise, ce qui compte au final, c'est que ces six titres vous ont totalement emporté, subjugé, vous faisant oublier toutes ces miséreuses cases vides de sens. Un duo où on retrouve Basile Ferriot, batteur de Xnoybis (tiens, quel hasard !) et Julien Bancilhon pour la guitare le plus souvent allongée et le chant éparse, presque maladif et irréel. Données techniques qui ne peuvent devancer ce vague à l'âme lancinant, cette finesse sans apprêté, cette élégance nerveuse, dans le jeu des baguettes ou des balais, l'agilité des arpèges avec des plectres aux doigts comme autant de possibles griffures ou la résonance magique d'un bottleneck sur les cordes. Les éclairs cisèlent d'un trait le ciel noir, la mise à nu et les écorchures se font en toute élégance, l'alchimie assez invraisemblable pour une musique atypique, concentré en un seul morceau, le poignant Mechanical Fever, aussi tendu que fendu, laisser couler rage et blessure. Retour de blues, retour de tout, on ne sent plus la douleur, & We Could Be Quiet exhale un parfum lourd qui vous nettoie en profondeur de bien des impuretés. Splendide.

SKX (14/09/2011)