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Souvaris/Sincabeza
Clown
Jazz - split LP
Gringo 2010
Les meilleurs
ennemis du monde, Anglais et Français, se retrouvent sur un bout
de vinyl après avoir partagé de nombreux kilomètres
ensemble. Et il n'y a pas que la route et les bières chaudes qu'ils
partagent, il y a aussi une certaine idée d'un post-rock instrumental.
De prime abord, ce n'est pas flagrant du tout. Ou plutôt si, flagrant
que Sincabeza fait la course en tête et vous la démonte direct.
Que leur rock mérite cette appellation contrôlée alors
que celui de Souvaris est du genre édulcoré et largement
plus post tout ce que vous voulez que rock. La bataille s'apprêtait
à être déséquilibrer. Mais à écouter
de plus près, on comprend pourquoi les deux groupes se sont liés.
Outre qu'ils ont mis le chanteur au placard (les cris lointains et impromptus
de Sincabeza ne comptent pas), ils aiment brouiller les pistes, orner
la musique d'instruments autres que le guitare-basse-batterie des familles,
triturer leur post-rock en couches multiples, en sonorités variées
et lui conférer un certain élan.
Avec les Anglais de Souvaris, vous avez la version Deluxe. Belle, propre,
mondaine, la croisière s'amuse d'entendre Tortoise après
tant d'années d'hibernation. Trop de bonheur dans les notes, c'est
insupportable. Le swing guilleret, les arpèges joyeux, ça
a le don de me plomber le moral. Mais rapidement, le cocktail fait trembler
les verres, la pression monte, les couches d'instruments se superposent,
bruitage électronique, cuivre sur Hello, Antelope au point
de dégager une certaine classe qui n'est pas sans rappeler le dernier
Zëro au beau milieu de Great Scott. A l'image de la transition
entre les deux morceaux qui glisse tout seul pour repartir sur un rythme
nerveux. Car c'est ce qu'il y a de bien aussi dans Souvaris, cette tension
sans cesse palpable, ce rythme général qui va de l'avant.
Contrairement à une majorité de groupes du même acabit
qui finissent toujours par s'en/vous endormir, Souvaris ne joue pas sur
le contraste montée/descente mais sur la richesse des sons et contre
toute attente, fini par séduire. Pour peu qu'on aime le luxe et
le confort.
Avec les Bordelais de Sincabeza, vous avez la version déchaînée
et galopante. On était à chaque fois resté sur notre
faim sur leurs deux précédents albums,
à regretter qu'ils ne lâchent pas la bride. Le vu est
exhaussé. Au-delà de toutes attentes. Avec l'arrivée
d'un quatrième membre et deuxième guitariste, Sincabeza
explose sa sagesse initiale, dilate son post-rock trop appliqué,
l'enrichit comme Souvaris d'une multitude de sonorités, le fracture
encore plus, le broie, le déchire, le font voler et danser sans
jamais se départir d'un rythme relativement basique et trépidant.
Histoire de garder pied dans ce monde de dingues. Sauf quand le batteur
se prend pour le roi de la samba, jouant aux percus et à la samba
!!! (Chick Chick Chick) en plein milieu de Facile à compter,
juste après un plan Fugazien. Totalement décomplexés
qu'on vous disait. Même les synthés lézardant Malalido
ne crispent pas. Créativité débordante, joie communicative,
bonheur d'offrir, Sincabeza arrive à vous réconcilier avec
un genre qui piquait du nez. Un split cinq titres aussi débordant
et opulent que la pochette, uvre de Dan Layton, membre de Souvaris,
est sobre et superbe.
SKX (10/03/2010)
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