Hitch
Clair.Obscur - LP
Vlas Vegas 2009

Les Belges de Hitch souffrent du même syndrome que les Autrichiens de Valina. Avoir commencer sa carrière de façon trop laborieuse, faute d'albums tout juste passables et devoir se coltiner depuis une étiquette de groupe moyen, de groupe sympa qui rentre par une oreille et sort par l'autre. Le groupe anonyme dont tout le monde connaît le nom mais dont tout le monde s'en tape. Comme Hitch l'indique eux-mêmes au début de leur biographie, bien que certains ne s'en aperçoivent que maintenant, ça fait quinze ans que Hitch existe. Et tout comme Valina et le bon vin, c'est avec l'âge et les multiples tournées à travers le monde que Hitch s'est bonifié.
Clair.Obscur
est déjà leur cinquième album et ce n'est que maintenant qu'ils frappent juste, qu'ils réalisent leur A Tempo, A Tempo à eux. Hitch tape dans un genre identique à Valina. Un grand fourre-tout puisant ces racines dans le noise-rock et l'indie américaine des années 90, un grand bordel bien pratique où on entasse un peu tout et n'importe quoi, de Jesus Lizard à Unwound, tout ces groupes qui ont fait les beaux jours de Touch and Go ou Dischord records, un accumulateur d'influences qu'ils arrivent enfin à sublimer. La frontière entre une compo honnête et une très bonne compo est souvent ténue. A réécouter pour l'occasion les albums précédents de Hitch, la différence ne saute pas aux oreilles et pourtant elle est là, indéniable. Le son déjà. Plus précis, percutant, résonnant. Avec John Cougleton (le mec de The Paper Chase qui a enregistré des tonnes de groupes comme Explosions in the Sky, 90 Day Men….) et Alan Douches au mastering, ce ne sont certes que des noms à la base mais ils savent tout de même comment faire sonner un groupe au plus juste. Mais des noms, aussi importants qu'ils soient, ne font pas tout. Le coeur de tout, c'est l'écriture et Hitch a cette fois-ci été touché par la grâce. Tout en restant pugnace, la musique possède cette profondeur que leurs précédents albums n'avaient pas. Une voix souvent posée et traînante qui rend ces morceaux plus sombres et beaux comme le magistral Chocking in air ou This is where it ends tout en retenue. Et ce contraste semble nouveau. Hitch étoffe ces ambiances, les varie comme le très trépidant Dance, Dance, Dance torché en moins de deux minutes et qui ne vous fera pas danser sauf si vous vous êtes coincés les doigts dans une porte ou bien Burn this place, plus proche de la neurasthénie d'un Lowercase et le titre de clôture The Paper beast. Sept minutes d'humeur électrique, d'un son se remplissant crescendo d'éclats de verres avant de terminer sur une mort très lente. En ce sens, Hitch a beaucoup progressé dans la maîtrise de ces émotions et la mise en relief de son agressivité, des morceaux comme Dirty Trixxxxxxx et Carbon Wheels faisant preuve d'une noise racée et acérée. Bref, c'est pas loin d'être la grosse surprise de la part d'un groupe dont on espérait (plus) rien et si ça ne changera rien à leur destinée écrite à l'avance, ces trois losers sont pour le coup magnifiques !

SKX (03/11/2009)