The Dictaphone - The Dreams - Mombu - Whourkr
Samedi 17 mars 2012
Le Jardin Moderne - Rennes
Festival Roulements de Tambour

11ème édition du festival Roulements de Tambour, projet d'une association étudiante de Rennes 2, dit Rennes 2 La Rouge pour tous les appels à la grève nationale lancée depuis ce campus. La veille, c'était soirée à L'Antipode, à forte tendance electro, ce qui signifie boycott et grève générale. Ce soir, pas de gréviste et pas de fainéant, tout le monde sur le pont et en choeur pour la deuxième soirée du festival au Jardin Moderne.

Belle affluence déjà présente pour The Dictaphone qui a l'immense tâche d'ouvrir le bal. The Dictaphone, a one-man band français sauf qu'ils sont trois sur scène. Tous alignés avec un guitariste, un batteur-chanteur (le one-man band en question, c'est lui) et entre les deux, un mec de profil devant un clavier. La course folle peut commencer. The Dictaphone mène son punk weirdo et minimaliste au pas de charge. Pratiquement aucun temps mort entre les morceaux et comme ceux-ci dépassent rarement les deux minutes trente, c'est une véritable rafale de Dictaphone qu'on se prend dans les oreilles. Je ne reconnais pas grand-chose du premier album, encore moins du fantastique single sur Sweet Rot et comme j'apprends après le concert qu'un tout nouvel album vient de sortir, j'en conclue que The Dictaphone a largement pioché dans ce dernier. Le problème de leur concert, c'est le coté robotique et machinale de la prestation, l'impression qu'ils ont joué cinquante-douze titres, un enchaînement sans passion et une présence scénique proche du néant. Malgré tout, le chauffage de piste est idéal.

Le résumé du concert de The Dreams tient en une seule phrase prononcée par le guitariste-chanteur qui n'avait pas bu que du thé : on est semi-professionnels, on fait ce qu'on peut. Cela faisait suite après un énième faux-départ et un concert qui avait commencé par une annonce du même guitariste, décidément dans tous les bons coups, déclarant qu'ils venaient de perdre tous les rythmes programmés sur leur précieuse boite à rythmes. Heureusement, la claviériste-chanteuse a son ipad, si jamais ils arrivent à le faire fonctionner avant de s'apercevoir, un morceau plus tard, que finalement, la boite à rythme n'avait rien perdu. L'ambiance est on ne peut plus détendu, l'interprétation des morceaux est flottante comme l'est la cohérence du cerveau du guitariste qui arrive à me faire rire tout de même avec ses blagues à deux balles entre les compos. Le duo a quelquechose de touchant, des branleurs magnifiques perdus au milieu d'un grand vide et d'une scène trop grande pour eux qui fait que je n'arrive pas à partir avant la fin. Mais on est d'accord, le pathétisme ne fait pas les grands concerts. Si vous croisez leur album, ne le bouder pas, c'est une toute autre chanson.

Le grand concert, il est à venir. Mombu est un duo italien composé de Luca Tommaso Mai, saxophoniste de Zu et Antonio Zitarelli, batteur de Neo, groupe plus obscur. Une association qui pèse lourd, autant en gabarit que le duo a corpulent qu'en puissance sonore. Car si je ne sais strictement pas à quoi m'attendre et que le doute subsiste devant un tel duo présentant cette instrumentation pour le moins osée, les premières secondes du show Mombu vont vite clouer au sol tout le public. Un saxo baryton, impressionnante bête électrifiée de partout, des pédales d'effets multiples et des sonorités graves s'enlaçant merveilleusement bien avec les rythmes voodoo d'un batteur qui n'a pas besoin de cogner comme une brute pour créer un tapis de rythmes hypnotisant. Entre afro beats et approche hardcore, le batteur engendre la transe et le bonheur que de bonnes soufflantes de saxo viennent attiser, contourner, télescoper, aliéner, emportant l'adhésion de l'audience. Même les passages plus ambiants où le saxophoniste joue avec sa pédale wah-wah ne me font pas sortir de l'hallucination. C'était lourdement bon et une putain d'excellente surprise.

On aurait pu en rester là mais comme ça fait du bien de rire aux dépens des autres, quelques mots sur Whourkr qui a la bonne idée de jouer en dernier pour qu'on aille se coucher plus vite. Un duo de, je ne veux même pas savoir de quel coin pourri de la France il sort, qui fait du death métal industriel comme on n'en fait plus depuis les années 80. Un guitariste qui enchaîne les riffs d'une banalité étourdissante et un chanteur secouant son admirable chevelure sur un chant typiquement grind. Mais là où ça devient épique et qu'on touche une certaine idée de la perfection, c'est quand ce méchant chanteur qui la joue velu arrête de secouer sa crinière noir comme le jais, se retourne vers les deux magnifiques laptops trônant sur une table derrière le duo et appuie délicatement de son fier index sur une touche pour lancer le rythme du morceau suivant. C'était ridiculeusement bon et totalement anachronique. Drôle d'idées de programmer ce groupe mais ça fait longtemps que le sens de l'humour étudiant est devenu un mystère.

SKX (28/03/2012)