Pop. 1280
Mardi 04 février 2014
Le Chien Stupide, Nantes

La trêve hivernale a duré trop longtemps. Quasi deux mois sans concert, depuis la triste fermeture définitive mais fêtée dans la bonne humeur de La Bascule début décembre 2013 et un épique concert de Jessica 93 au bout de la nuit.
Direction Nantes, accompagné par la crème de la crème de la vie rennaise, pour une soirée à thématique littéraire. Voir Pop. 1280, nom d'un roman de Jim Thompson (1275 âmes en français) au Chien Stupide, nom d'un roman de John Fante, ça sent le glauque et la lose. La météo confirme. Arrivée sous la pluie et le vent. Le Chien Stupide, bar en plein centre-ville, juste à coté du Château des ducs de Bretagne. Un endroit pas fait pour les concerts, qui s'y font rares d'ailleurs. Mais à Nantes, comme à Rennes et comme partout, va trouver un endroit pas trop pourri où tu peux faire jouer un groupe inconnu qui pourrait attirer 80 personnes grand maximum dans un jour de folie furieuse, avec un minimum de frais et suffisamment d'argent à donner aux groupes pour qu'ils remettent de l'essence dans le van le lendemain.
A l'entrée, le public donne ce qu'il veut puis s'entasse comme il peut dans un espace trop petit. Les instruments de Pop. 1280 prennent déjà la moitié de la pièce principale. Le public absorbe le reste et les autres s'agrippent sur le coté le long du comptoir. Je me fraie un chemin, me plante juste devant, les quatre New-yorkais débarquent et j'ai les aisselles du chanteur sous le nez. Ça ne s'annonce pas optimal mais Pop. 1280 a suffisamment de concerts au compteur et d'expérience des plans à l'arrache pour ne pas tirer profit de cette proximité et faire suer son rock'n'roll mutant.
Et effectivement, Chris Bug, le chanteur longiligne dans son magnifique pull blanc, assure le spectacle de sa belle présence. Les deux synthés en ont aussi de la présence et ça fait peur. Trop de synthés tuent le rock'n'roll. Mais le Korg joué par une nana assure le rôle de basse tandis que l'autre, frappé par le guitariste, balance des sonorités vachardes. D'ailleurs, j'en serais presque à souhaiter que Ivan Lip délaisse ses cordes pour les touches du clavier car le son sortant de sa guitare a le goût d'un infâme brouet ne ressemblant à rien. C'était peut-être dû à la configuration du lieu mais comme sur le dernier album, ces effets brouillardeux sont en masse, on peut avancer que le rendu en concert ne vaut pas tripette. Le concert repose donc sur une section rythmique dominante et groovante, tant bien même la basse à l'allure d'un synthé. Clin d’œil appuyé au passage à Allegra Sauvage portant admirablement bien un t-shirt de Grauzone, soit le tout premier groupe de Stephan Eicher dans les années 80 quand il faisait de l'electro-indus. De quoi désormais affirmer sans hésiter que en fait, Pop. 1280 n'a jamais été inspiré par Birthday Party mais par Grauzone. Merci à elle d'avoir rétabli la vérité à des hordes de critiques incultes et incapables.
Pop. 1280 joue un large panel de ses deux albums plus un ou deux nouveaux morceaux. Je crois même avoir entendu Step Into The Grid du EP The Grid en rappel, juste avant que le batteur n'ait sa dose dans la fournaise, donne un coup de pied dans une cymbale, balance sa caisse claire sur le synthé du grateux qui se casse la gueule (le synthé, pas le grateux) pour porter en lui et sur deux touches du milieu les stigmates de l'instrument qui a peut-être bien rendu l'âme. Mais pour un groupe qui en comporte 1280, il devrait pouvoir survivre. Et d'âme, ce concert en a sûrement manqué mais le groupe a fait le show, a assuré l'essentiel et une tenue impeccable des compos mais demande tout de même à être revu dans de meilleures conditions. Retour sous encore plus de pluie, plus de vent et une défaite de onze hommes jaunes. C'était bien la soirée de la lose.

SKX (05/02/2013)