ventura
vitesse


Ventura
Superheld – CD
Vitesse records 2025

Avec Ventura, il faut toujours laisser la chance au produit. Une habitude avec le trio suisse. Jamais enclin à frapper les esprits d’entrée de jeu, te retourner la tête en deux coups de cuillère à pot. Mais leur musique insuffle lentement son venin. Superheld, le cinquième album en presque vingt ans, a failli refaire le coup. Oui, failli seulement.
La patte Ventura se reconnaît tout de suite. Pas le genre de la maison à bousculer les traditions. C’est d’ailleurs dans les mains assurées de Serge Morattel que Ventura a une nouvelle fois enregistré son album. On ne change pas une recette qui gagne. C’est donc reparti pour un tour d’’indie-rock-noisy aussi mélodieux que puissant avec la classe et la sensibilité baignant toujours dans un fond de mélancolie dont Ventura s’est fait le chantre sans qu’on arrive à vraiment expliquer le pourquoi du comment. Cette recette paraît si simple que cette alchimie si fine a toujours eu un petit parfum miraculeux pour toucher autant. Superheld comporte encore ces moments de grâce, des passages en apesanteur contrebalancés par des charges plus agressives et carrées. La douceur ou la sérénité du chant alors que ça tempête fort derrière lui. Des mélodies subtiles, aériennes, en pointillé, prenantes et l’alternance aussi classique qu’efficace entre calme et vigueur que Ventura maîtrise à merveille.
Mais les écoutes ont beau se répéter, la magie n’opère pas avec autant de charme. Ventura a pourtant remis une couche de pugnacité par rapport au précédent et plus sombre Ad Matres. La doublette Patron Saint et Obviously ne rigolent pas et fait preuve d’une belle hargne et de riffs saignants mais ne chamboulent pas plus que ça. Et c’est le cas régulièrement. Manque un je ne sais quoi de ce petit miracle précité qui arrivait à émouvoir ou enflammer sur la longueur. Manque de morceaux véritablement marquants possédant ce caractère incontournable vous transportant dans cette sphère unique dont seul Ventura a les clefs. Sans parler de titres semblant manquer de caractère ou plus anecdotique comme l’acoustique de Freeze In The Hell qui à chaque fois me rappelle vaguement un truc de Nirvana unplugged, In Me There Are Three en mode pilotage automatique ou From Evil qui clôt l’album tout en délicatesse et en spleen mais qui ne touche pas vraiment la corde sensible. Je me reprendrais cependant bien des Bubbles dans la tronche, le plus long et accidenté Advertiser avec de beaux reliefs ou la guitare acoustique de Optimistic se mélangeant avec bonheur avec l’électricité et ce coté lancinant répétitif tranquillement envoûtant. Alors, ne nous méprenons pas. Superheld reste un bon album, très agréable à écouter mais ça ne sera pas celui vers lequel je reviendrais le plus volontiers.

SKX (06/03/2025)