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Toru
Velours Dévorant – LP
WV Sorcerer/Bagdaddy/Aktiver Aufstand In Plastik/Araki/Day Off records 2025

Velours Dévorant et caresse fatidique, Toru ne va pas ménager sa peine pour t’attirer dans son piège, déployer les grands moyens et provoquer un fracas d’enfer pour ronger ta résistance, progresser dans des structures mouvantes feignant les éclaircies pour définitivement te plier à leur tempête où tu n’as jamais su prévoir d’où venaient les rafales. Il faut prendre le Toru par les cornes et autant bien s’accrocher parce que ça va secouer.
Et c’est sans round d’observation. VHS fait chauffer la bande alors que l’histoire a déjà commencé. Un morceau d’ouverture qui prend à sec et donne la couleur d’un scénario qui ne tolérera pas le tiède et les faux-semblants. Déjà averti par un premier album qui avait posé les bases, le trio se partageant entre Lyon, Marseille et Nice passe à l’échelon supérieur dans la catégorie Noise & Passion, option maîtrise d’œuvre atypique. Plus féroce, plus beau, plus dingue, plus éclaté, plus fascinant, les qualificatifs ne manquent pas pour dire que Toru fait tout pareil qu’avant mais en mieux, bien aidé par l’enregistrement de Nicolas Dick (Kill The Thrill) leur conférant plus de clarté, d’ampleur et de puissance.
Toru n’hésite pas à faire le grand écart entre les monstrueux assauts soniques orgiaques et les répits troublants, angoissants, une rêverie noire qui prend son temps pour dérouler de drôles d’ambiances n’incitant pas à l’optimisme. Quand Héloïse Francesconi (guitare), Arthur Arsenne (guitare 8 cordes, basse) et Nicolas Brisset (Sommeil De Brute, Isaac) à la batterie décident de tout envoyer valdinguer, ils ne le font jamais à moitié. Tout brûle dans une grande débauche d’électricité volcanique et impétueuse, aux portes du chaos et d’un fort esprit free-noise. Et quand le trio donne l’impression de s’apaiser, c’est pour enrichir leur palette sonore de synthés modulaires ou non, d’une flûte, de cloches, d’objets qui font des bruits non identifiés en plus de l’attirail guitares-batterie au service d’atmosphères plus ou moins longues, plus ou moins lentes qui ont du sens et font partie intégrante de la scénographie musicale de Toru. En gros, c’est pas du vain remplissage et ça te triture les tripes autant que les méchantes baffes que le groupe allonge en aller-retour.
Parce que ce qui captive vraiment sur Velours Dévorant et doit emporter l’adhésion d’un grand nombre de mélomanes alors que rien n’est fait pour faciliter la tâche, c’est la furieuse énergie rock et noise se dégageant de ce deuxième album en toutes occasions, le pouvoir de propulsion qui amène sans cesse ce sentiment de tension et d’urgence, des termes comme expérimental et improvisé balayés d’un revers de main par la précision que nécessitent ces arrêts brutaux, ces changements de direction, ces vastes cavalcades ne se dispersant jamais. L’impro (et encore), Toru laisse ça pour les concerts comme le samedi 16 décembre 2023 quand le trio avait fait trembler les murs du Ty Anna à Rennes avec notamment un batteur qui en avait mis plein la tête et plein les yeux. Avec une constante créativité qui déborde de tout ça, des accords de guitares au début de Volutes qui cristallisent les sens pour un titre se révélant déchirant et magnétique, VHS qui est ni plus ni moins qu’un fabuleux morceau noise-rock en chair et en os terriblement vibrant et carnassier, deux compos au-delà des dix minutes qui se montrent imprévisibles, très contrastées, aussi violentes qu’étranges et charmeuses. De ces cinq titres commençant tous par la lettre V, il en aurait fallu un sixième, un truc comme Vénération parce qu’on a pas fini de l’adorer ce Velours Dévorant.

SKX (25/02/2025)
CD : arsenicsolaris
tape : cruelnature