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permafrost
yoyodyne
araki


Sala Bestia
Plenty Of Nothing – LP
Permafrost/Yoyodyne/Araki records 2024

Plenty Of Nothing mais riche de tout. Un premier album par un trio expérimenté se remplissant d’une multitude de détails pour former une texture cohérente, se nourrissant d’une grande variété de sources musicales pour abreuver son propre sillon, déployant une palette d’émotions qui en feront voir de toutes les couleurs, des plus lumineuses aux plus sombres de la part d’un groupe qui s’habille de trois fois rien, avance sans tapage, presque aride, à l’impact ne vous sautant pas à la gorge. A la fin, tous ces petits riens mis bout à bout, ça vaut beaucoup.
Avec deux ex-Revok et un ex-Made In Canada, Radiant et Schoolbusdriver, Sala Bestia écrit le premier chapitre de la nouvelle vie de ce groupe parisien avec une sorte d’adoucissement et de mélancolie que leurs projets précédents n’avaient pas. Mais c’est avant tout un disque tout en faux-semblant. D’apparence sensible, limite fragile et au bord de la rupture parfois, Plenty Of Nothing évolue aussi sur une crête électrique agitée. Il donne l’impression de pouvoir s’envoler avec l’aide d’une ligne de synthé, un chant posé et se rappelle à nous par quelques tensions bruyantes et nerveuses, se fait impalpable et spleenesque puis appuie soudainement les coups, montre des riffs tranchants alors que la minute d’avant, les arpèges étaient mélodiques et délicats. Et dans tous les cas de figure, c’est fait avec beaucoup de finesses, de mouvements ondulants, de structures invisibles, d’angles qui s’arrondissent et d’émotions à portée de main.
Sala Bestia joue une musique intime et personnelle avec les armes de l’indie-rock, du slowcore, de l’emo et du noise-rock. Ça donne des morceaux doucement envoûtants, toujours parcourus par des intentions mélodiques, finement abrasifs, à l’intensité ne s’emballant jamais réellement, sans jamais monter dans les tours mais sans jamais s’effondrer non plus, avec la section rythmique capable de montrer les muscles, se faire plus dur et noise (Decision To Cut) alors que SY’ Followers In Heaven titille les territoires psychédéliques au bout de ses presque six minutes et que If It Helps clôt l’album par encore plus de secondes dans une aura désabusée et touchante. Un dosage millimétré, beaucoup de subtilités tout en restant sobre et rugueux sur les bords avec un enregistrement au cordeau de Pierre Antoine Parois (Papier Tigre). Sala Bestia joue sa petite musique interne, suit son instinct et signe une entrée en matière très prometteuse.

SKX (11/01/2025)
Version CD sur Cheap Satanism