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Mossaï Mossaï
Fourrière – LP
Figures Libres records 2025

Fourrière, ce n’est pas une voie de garage mais l’ouverture vers des chemins de traverse encore plus riches et nombreux, pas une impasse mais la promesse d’être à nouveau surpris et désorienté. Mossaï Mossaï nous avait pourtant prévenu avec Faces, premier album inclassable. Le groupe de Tours n’est pas du genre à faire du surplace et continue sa quête vers de nouveaux territoires, diversifie les approches tout en solidifiant les acquis, bouscule les sens et intensifie sa présence et sa singularité dans le paysage sonore.
Et de la même façon que Faces avait pris son temps (mais pas trop) pour se dévoiler, Fourrière ne s’est pas révéler de suite (mais plus quand même). La séduction au final n’en est que plus belle quand rien ne presse. La faute ou grâce, c’est selon, à des compos majoritairement portées sur les ambiances où la dimension rock, noise, plus frontale s’estompe devant des climats tour à tour doux, rêveurs, poétiques, inquiets, graves ou lardés d’effets synthétiques. Sur les dix morceaux, quatre peuvent être considérés comme de brefs interludes (Image 1, Souvenirs 2 et 3 ainsi que Rêverie 4) alors que le seul titre qui s’appelle Interlude n’en est pas un mais est de nature également très atmosphérique et éthéré. Un déroulé du disque qui amène les pensées à s’échapper des contraintes du réel, à flotter dans ses parages sans être sûr d’être vraiment là à l’écouter. Mossaï Mossaï léger et insaisissable.
Et puis vous avez des compos bien plus conséquentes où la guitare se met en sourdine, la batterie également ou alors sous forme de percussions et de pulsations hybrides. Les huit minutes trente de Limitrophe, tout le début de Blottie, La Comptine, quand Mossaï Mossaï sculpte l’air pour le rendre plus sombre et beau, que la tension se fait palpable derrière la calme et trompeuse apparence et que le message politique des paroles finement et intelligemment amenées (contre le génocide à Gaza pour Limitrophe et à propos de la transphobie pour La Comptine) leur donnent encore plus de profondeur. Le chant de Marie Escadafals fait une nouvelle fois des merveilles, affirme sa prépondérance au sein de la musique de Mossaï Mossaï, une voix aussi puissante que fragile, aussi sensible que concernée trouvant une poésie bien à elle pour vous toucher.
Mossaï Mossaï n’a pas perdu pour autant sa virulence et ses coups de semonces, le sens de la mélodie agitée et électrifiée. Fourrière (le titre éponyme) tout en martèlements, fracas et stridences/triturations contrôlées, le trépidant Branche-Oeil et toute la seconde partie de Blottie qui se fait bien plus dense et rythmée rappellent combien Mossaï Mossaï est aussi cette entité noise percutante et haletante jouant avec le bruit comme d’autres avec le feu, sans se brûler et avec brio.
Fourrière
est au final un deuxième album contrasté, un peu moins marquant de bout en bout que Faces. Il n’en reste pas moins un disque à part et séduisant pour un groupe exécutant sa propre partition avec une belle personnalité.

SKX (01/10/2025)