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Lésion Étrange
s/t – CD
STNT/Arsenic Solaris/Araki records 2025

Se confronter à un album ne comportant que deux longs morceaux peut augmenter votre dose de stress quotidien et intimider les plus démunis. Légion Étrange aime les défis et présente Alpha, 23 minutes au compteur et Oméga, qui n’en fait qu’un peu plus de 18. C’est pas banal et surtout, ça va très bien se passer. Vous êtes entre de bonnes mains. Voir des mains de spécialistes. Alex (guitare) avait déjà tordu le coup aux préjugés avec Torticoli en sortant un album deux titres s’étalant dans la durée. Dernièrement, l’expert de la six cordes s’est beaucoup fait entendre chez Tombouctou, qui n’est qu’un de ses nombreux autres projets comme par exemple Cougar Discipline ou Schleu dans lesquels évolue également Jo, le batteur aimant démultiplier ses bras dans tout plein de groupes. Lyon est donc l’épicentre de toutes ces liaisons, non pas étranges mais familières constituant une belle légion (toujours pas étrangère) du bruit, de quoi rassurez quant à la teneur de Lésion Étrange (en plus, c'est un autre lyonnais qui est aux manettes de l'enregistrement, Raphaël Aboulker du duo Boucan).
Mais si le duo se nourrit de toutes ces expériences passées et présentes, il n’en demeure pas moins un nouvel avatar singulier et unique. Deux compos d’une étonnante fluidité qui font largement oublier qu’elles sont au long cours. Il s’y passe pourtant de nombreux évènements, de fractures, de changements, d’explosions, d’accalmies et d’atmosphères changeantes. Mais pas au point de sortir le cliché habituel – avec ces deux morceaux là, on aurait pu en créer dix. La dynamique est naturelle. Les articulations sont huilées. Même quand ça change subitement comme après neuf minutes et quelques sur Oméga. Alors que les lumières semblaient doucement s’éteindre, la compo repart violemment pour quatre bonnes minutes du passage le plus noise, furieux et orgasmique du disque. Sans crier gare et tout cela parait normal. Jamais forcé. Une narration limpide malgré les secousses de la part d’un duo ne perdant jamais le fil de l’histoire. Notamment sur Alpha, longue cavalcade hypnotique débutée sous le doux son d’un orgue se brûlant dans les affres de dissonances grandissantes et qui repartiront de plus belle après un moment propice à une belle rêverie angoissante sur les bords en retrouvant ce rythme de batterie effrénée et cette mélodie puissante et frénétique.
Oméga présente un profil plus éclaté avec pour commencer, des accords bluesy nous rappelant qu’Alex a donc été le guitariste de Torticoli. Ensuite, tout un vent de cascades, de déflagrations, d’inquiétude, une grande tornade à la limite du chaos au milieu, des aspirations plus free-noise et de magnifiques arpèges pour conclure en beauté un disque au scénario imprévisible mais parfaitement conçu et toujours passionnant délivrant son lot d’émotions et de tremblements tout en sollicitant le physique. Alpha et oméga, en espérant fortement que ça soit surtout le commencement d’une belle aventure et pas déjà la fin.

SKX (23/04/2025)

Pour la version cassette, rajoutez le label Day Off :