uniform
sacredbones
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Uniform
American Standard LP
Sacred Bones records 2024
American Standard est le nom dune marque qui fabrique des
appareils de plomberie. Des toilettes notamment. À genoux devant
la cuvette, cest ce que voit quotidiennement le chanteur Michael
Berdan, cette putain de marque quand il vomit parce que atteint de boulimie
nerveuse. On a connu plus glamour comme entrée en matière.
Mais cest la réalité, sa réalité à
Berdan, celle quil a choisi de divulguer dans un article
de The Quietus en juillet dernier. Et dont il a fait le sujet principal
et unique du cinquième album de Uniform.
Quatre longs titres pour tenter dexpurger ses démons. Un
disque comme thérapie. Quil avait déjà commencé
avec Drunkdriver,
poursuivi avec Uniform, sans le dire à personne et même se
lavouer sans doute, question de survie. Mais là cest
frontal et au grand jour. Avec laide des écrivains B.R. Yeager
et Maggie Siebert pour trouver les mots, les paroles qui font mal mais
nécessaires pour avancer. Si vous avez suivi les épisodes
précédents du groupe new-yorkais, vous ne serez pas surpris
par ce climat pesant et malaisant. Une marque de fabrique, encore une,
mais qui fait péter les plombs plutôt que la plomberie. Une
dimension cathartique de la musique de Uniform qui sest toujours
faite sentir. Elle devient plus réelle, une noirceur encore plus
profonde mais qui paradoxalement, laisse la place à une lueur despoir.
Parait-il que ça va toujours mieux en le disant.
Le symbole de cette confession, cest American Standard, le
morceau de vingt-et-une minute recouvrant toute la face A. Ça ressemble
à un chemin de croix sans fin, un tourment évacué
jusquà vomir ses glaires quand Berdan hurle en intro comme
un damné seul dans la nuit crasse sur fond de grignotements électroniques.
Un vaste mantra cyclique prend ensuite possession des entrailles. La chape
indus-noise-electro concoctée par Ben Greenberg sétale
dans toute sa démence, dévore de lintérieur.
Lapparition dun gimmick mélodique est dautant
surprenant mais franchement bien vue. Une petite lumière qui est
peut-être à mettre au crédit du mellotron joué
par Brad Truax, un nouveau venu chez Uniform assigné à la
basse sur ce disque, là aussi une première chez Uniform.
Une contrebasse (par Henry Fraser) a même été ajoutée
sur cette compo. Bon courage pour la distinguer. Et alors quon pense
le morceau séteindre doucement sous son propre poids au bout
dun quart dheure, il repart comme une balle sous les coups
dune rythmique frénétique avec ce relent mélodique
sous-jacent qui le rend encore plus poignant et furieux pendant que Berdan
continue de sarracher les cordes vocales. Épique, primaire,
rude et beau.
Les trois morceaux suivants vont continuer de remuer les tripes avec deux
batteurs en action (Michael Blume et Michael Sharp, pour un groupe qui
a débuté avec une boite à rythme, cest une
sacré évolution) qui semblent battre en même temps
sur le puissant et tribal This Is Not A Prayer que naurait
pas renier Neurosis. Lélectronique et tout lattirail
de synthés zèbrent le climat délétère.
Le metal se fait éclater sur un autel trop venimeux et étrange.
Godflesh se fait éventré. Swans prend un méchant
coup de vieux. Mais tout ça cest pour rire parce que ces
références restent indétrônables et Uniform
a su parfaitement sen servir pour créer son propre univers
aliénant. Dans un monde normal, Permanent Embrace, morceau
le plus bref, salement efficace, urgemment rock et punk avec une pointe
de grandiloquence qui ne fait pas de mal chez ce groupe très âpre,
aurait dû ouvrir cet album. Mais rien ne tourne normalement chez
ce groupe. Mais il se soigne et nous avec par la même occasion.
Dans les grandes largeurs la branlée. Avec son somptueux livret
de photos, American Standard est une sacrée tranche de vie,
radicale comme Uniform a lhabitude den asséner mais
aussi intime, profondément touchante et unique en son genre.
SKX (04/12/2024)
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