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The
Jesus Lizard
Rack LP
Ipecac records 2024
Je ne pensais pas un jour pouvoir chroniquer un disque de Jesus Lizard.
Excepté à la rubrique Vieille Gloire & Amour de Jeunesse.
Un groupe maintes fois cité dans ces pages, une référence
absolue, le number one dans mon ptit cur et pas lombre
dun seul article. Un comble enfin réparé grâce
à un retour miraculeux. Jesus Lizard est ressuscité. Quelques
apparitions en public avaient bien eu lieu pour permettre à David
Yow de marcher sur les foules et montrer que ce groupe nétait
pas quune légende racontée aux plus jeunes pour les
faire baver et rappeler aux anciens qui bavent combien ce groupe était
grand. Mais là, cest un album, un vrai, quatre lettres qui
claquent sur linaltérable, onze nouveaux titres pour remettre
leur couronne en jeu. Et qui plus est avec la formation dorigine,
avec le batteur Mac McNeilly qui avait abandonné le navire sur
Blue en 1998.
Vingt-six ans, une éternité, et toutes leurs dents. Mais
pas comme au premier jour, ni le deuxième dailleurs, ça
cest pas possible, forcément. La sainte trilogie Head-Goat-Liar
à jamais au panthéon de Jesus Lizard. Les trois albums représentant
la substantifique moelle du groupe de Chicago. Sans eux, Jesus Lizard
ne serait pas Jesus Lizard, ne serait jamais devenu ce groupe cultissime.
Ils sont la base de tout à partir de laquelle Jesus Lizard à
commencer à devenir moins essentiel par la suite. Mais avec ce
groupe, comme le complémentaire reste important, Down, Shot
et Blue, bien quils aient moins fréquenté la
platine, ne se refusent pas. Merde, cest Jesus Lizard quoi ! Un
groupe qui flottera toujours au-dessus des masses laborieuses. Et lannonce
dun nouvel album dont je nattendais pas grand-chose, qui ma
laissé assez circonspect après plusieurs écoutes
me rappelle que Jesus Lizard nest vraiment pas un groupe comme les
autres, quil est toujours au-dessus du lot. Rack na
pas (trop) tardé à faire son effet, il a réveillé
des sensations et de vieux réflexes endormis depuis des lustres,
refait frémir la machine et étale à nouveau au grand
jour la personnalité unique de ce groupe.
Certes, Jesus Lizard apparaît parfois en mode pilotage automatique.
La batterie de Mac McNeilly se fait plus directe, simple, pas aussi dingue
quavant. Même certaines parties de basse du diabolique David
Wm. Sims ne marquent pas les esprits, pas aidé il est vrai par
la production du jeune et inconnu Paul Allen qui a oublié que Jesus
Lizard est groupe capable de cogner fortement et durement. Mais franchement,
après plus de deux décennies de silence et la soixantaine
passée, Jesus Lizard montre quil a encore des choses à
dire et Rack se révèle joliment fringant.
Avec sa pochette qui nest pas luvre dune intelligence
artificielle mais de Malcolm Bucknall, lartiste anglais né
en 1935 dont Jesus Lizard avait déjà utilisé les
peintures pour les pochettes de Liar, Down et le split single
avec Nirvana, ce septième album fait frétiller le rock comme
eux seuls savent le faire. Jesus Lizard décoche des flèches
acérées filant grand train avec ce soupçon de mélodies
qui fait toute la différence comme Dunning-Kruger, Grind
ou un Moto(R) qui fait trépigner de plaisir. Pour les plans
plus retors, sous-tension et piégeux, Alexis Feel Sick ou
Armistice Day sont là pour assouvir vos instincts primaires
évoquant les grandes heures du groupe, ce que Lord Godiva
prolonge, ce vieux titre que Jesus Lizard avait joué uniquement
en concert jusque là. Et si vous voulez de létrange
et de linquiétant avec des sonorités nouvelles pour
du Jesus Lizard, vous avez What If? et lexcellent et plus
original Swan The Dog avec ce qui ressemble à du piano/clavecin
pour semer le trouble dans lordre établi. Jesus Lizard na
pas fait que vivre sur ses (vieux) acquis, il va aussi de lavant
et varie les approches. Avec conviction et toujours ce savoir-faire singulier
dont le quatuor a écrit les fondamentaux. Et si rythmiquement,
de nombreux groupes sont capables de faire désormais aussi bien
que les maîtres, personne ne possède et ne possédera
le jeu et la classe de Duane Denison et sa guitare magnétique.
Cest encore lui et plus que jamais sur Rack qui tire le groupe
vers le haut, qui donne cette touche magique, des riffs lumineux qui désarçonnent,
emballent, enflamment, tranchent en deux, une créativité
folle au service de compos sans superflu mais sacrément et finement
ciselées. A ce tableau, il ne manque que le maître de cérémonie,
linoxydable chanteur et clown David Yow dont la voix na rien
perdu de sa verve, son mordant, son charisme, qui sessaye même
parfois à chanter sans se planter, offrant ainsi une performance
digne de son rang. Jesus Lizard est revenu. Longue vie au roi.
SKX (22/11/2024)
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