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The Flying Luttenbachers
Losing The War Inside Our Heads – LP
ugExplode/God records 2024

S’il y en a un qui n’a pas perdu la guerre à l’intérieur de sa tête, c’est bien Weasel Walter. Losing The War Inside Our Heads, dix-septième album de Flying Luttenbachers. Weasel Walter n’abdiquera jamais. Le dernier survivant d’une guerre entamée en 1991, qui a vu de nombreux combattants défilés dans les rangs de ce groupe culte, qui avait ployé un genou entre 2007 et 2017 mais qui s’est remis sur pattes et n’arrête plus de tirer à vue depuis ce retour d’entre les morts. Toujours un horizon rose dans un coin de la caboche. Dans sa tête, Weasel Walter et son Flying Luttenbachers plus forts que tout.
À tel point que la belette (Weasel en anglais, son vrai nom étant Christopher Todd Walter (il n’avait que onze ans quand il a choisi ce pseudo, faut lui pardonner)) est seul au monde aux manettes de cette nouvelle offrande. Aux oubliettes la formation qui avait œuvré sur les deux précédents albums. Excepté sur un titre (Excruciation) sur lequel Luke Polipnick et Charlie Werber prennent la place du bassiste et batteur, Walter l’insatiable joue de tous les instruments sur les quatre autres compos. Qu’il a écrit bien sûr sauf le mouvement cinq de Et Exspecto Resurrectionem Mortuorum (Et j'attends la résurrection des morts) de Olivier Messiaen. Rien de lui fait peur, même pas s’attaquer au répertoire de compositeurs contemporains. On sait le bonhomme très fan de Iannis Xenakis également. Et de prog rock, de no-wave, de free-jazz, de classic rock, de grind, de death metal. Aussi bien Kiss que James Chance ou Magma et Coltrane. C’est encore une fois tout ça Losing The War Inside Our Heads. Dans des proportions toujours plus ou moins remaniées. Avec l’intensité et la rapidité en fil rouge. Sauf quand il revisite la compo de Messiaen. Un minimum de respect quand même, c’est pas une brute non plus. Et The Flying Luttenbachers en mode solennel et drame imminent avec grandes orgues de sortie et un rythme de jugement dernier, c’est pas tous les jours alors profitez.
Pour le reste, la foudre s’abat comme au premier jour. De manière assez concise, ultra percutante et efficace sur les cinq minutes de Id Vomit. De façon plus loquace jusqu’à la logorrhée sur Excruciation et une guitare qui n’en finit plus de baver. Ça toujours été le fond de commerce de Weasel Walter mais là, son solo de la mort n’arrêtant pas de déraper, crier, dégobiller, tape sur le système. Ma résistance cède avant la fin de ces onze minutes interminables pendant lesquelles le trait semble être forcé. Je préfère mon Flying quand ça explose à parts égales entre les rythmiques infernales, les gerbes d’électricité d’une guitare qui n’en met pas partout, les convulsions, les longues lignes droites suicidaires, les tornades déboussolantes, une agressivité spontanée bien que tout ça soit très pensé et cette pointe de grandeur brute que Walter insuffle à The Solution Is The Problem et les dix minutes de Crawling 1000 Meters Across A Cold Stone Floor Towards The Forbidden.
Alors qu’en mai dernier, The Flying Luttenbachers a publié Spectral Warrior Mythos 2, à savoir un enregistrement de transition avant le reformation de 2017, Losing The War Inside Our Heads semble également un disque étape entre deux périodes de la vie mouvementée d’un projet basé à Chicago, pas celui ayant le plus d'impact mais qui fait l'affaire tout de même. Entre du Flying Luttenbachers classique et la recherche de nouvelles pistes, avec des structures toujours aussi ambitieuses et fines derrière l’apparent déchaînement de violence et de notes n’empêchant pas des surprises, des réserves aussi et la certitude que Weasel Walter a déjà son plan dans la tête pour le prochain Flying Luttenbachers. La guerre ne fait que commencer.

SKX (06/12/2024)