tunic
artoffact


Tunic
Wrong Dream – LP
Artoffact records 2023

En deux albums et un régiment de singles que Tunic avait regroupé sur Exhaling, le groupe canadien semblait avoir fait le tour de son petit monde, avoir été au bout de son propos punk-noise sans concession. Soit il répétait à l’infini le même album à l’image d’un Unsane, soit il commençait à chercher d’autres voies d’expression. Tunic s’imaginant mal ce qu’il pouvait faire de mieux dans le genre qu’un Quitter, il a judicieusement choisi le chemin de la mutation. Sans renier la base. Wrong Dream, vraie avancée.
Un troisième album porté par des vents nouveaux. Ça commence par un disque produit et enregistré par Seth Manchester (Big Brave, Daughters, Psychic Gravyard, Metz et une palanquée d’autres groupes qui comptent) pour se mettre bien comme il faut. Un son plus clair, précis, avec de l’espace pour que ça sonne encore plus saillant et matraquant. Et surtout des compos qui prennent de l’épaisseur, du coffre et de la longueur quand tout était dit auparavant en moins de deux minutes. Une parallèle identique avec Hammerhead quand le trio de Minneapolis avait sorti Into The Vortex après Ethereal Killer.
Tunic change de dimension, écrit de meilleurs morceaux, plus variés, plus personnels et qui restent en tête. David Schellenberg (guitare, chant) et Dan Uger (batterie) qui ont fait appel cette fois-ci à Drew Riekman pour la basse (il a aussi produit le disque avec Manchester) ont travaillé au corps leurs morceaux, diversifié les angles d’attaques, les humeurs, les rythmes qui sont loin d’être toujours dans le rouge, développé les mélodies, multiplié les accroches et tout ça en maintenant la tension, ce sentiment d’urgence, augmentant même plus d’une fois la pression et le malaise, déplaçant le curseur de la violence vers quelque chose de plus désespéré et sans retour comme la fin du haletant Disease. Ou les fluctuations de Protected d’un groupe qui n’hésite plus à complexifier ses structures, changer les cadences au sein d’un même titre alors qu’il adorait foncer dans le tas. Chaque titre marque les esprits, bénéficie d’un riff, d’un rythme, d’une ligne de chant, le tout en même temps qui rendent passionnant cet album de bout en bout. Dernier titre inclus avec Empty Husk, compo de six minutes et quelques la plus ambitieuse voir la plus osée avec son piano, ses arrangements inédits et sa mélancolie rampante qui finit par s’enflammer en beauté. Tunic passe la vitesse supérieure et vous enrobe d’un album magistral.

SKX (29/06/2023)