rimel
slowdeath


Rimel
Transparent – CD
Slow Death records 2023

C’est pas tous les jours qu’on cause de Thionville. La dernière fois et ça remonte à loin, c’était à propos de Hems et Davy Jones Locker. Et trente ans plus tard, il va être encore question de Davy Jones Locker. La surprise est de taille. Mais ce n’est pas pour une reformation de DJL. Que du neuf pour en mettre plein la vue avec Rimel.
Deux anciens membres de DJL. Le chanteur Thierry Korngold qui a maintenant rajouté la basse à sa panoplie et le guitariste David Valli (qui officiait également en solo sous le nom de Pore, deux enregistrements sur Permis de Construire au début des 90’s et beaucoup plus récemment avec Foggy Bottom). Vous rajoutez un batteur, Steph Le Steck, et Rimel est né.
Le danger serait de voir Rimel à travers le prisme de Davy Jones Locker. Deux entités différentes. Des ponts indicibles sont pourtant jetés. Au-dessus d’une mare de fuzz qui n’a jamais cessé de brûler et alimenter le brasier rock des protagonistes. Et par la diction et ces mots simples qui marquent, qui évoquent plus qu’ils affirment, ce sens de l’image et des associations d’idées dont la virulence et la noirceur se font désormais en français. Un pari toujours risqué pour ce genre de musique amplifiée mais l’obstacle est habilement contourné.
Liens entre hier et aujourd’hui. Chair commune indéfiniment renaissante. Rimel répand à présent un rock minimaliste et bruyant, répétitif et accélérant inexorablement, hypnotique et méthodique. Du genre d’hypnose qui ne donne pas de beaux rêves et de méthode ne demandant qu’à partir en vrille. Les riffs qui ne s’embarrassent jamais de trop d’accords sculptent des boucles nerveuses, rajoutent une couche, continuent d’appuyer, forment des nappes abrasives, charbonnent des mélodies très noisy à la Jesus And Mary Chain avec un courant plus froid et implacable remontant l’échine dorsale. Transparent possède ce mouvement à la fois ample et abrupte, faussement lancinant ou trépidant à l’instar du très bon Endorphines, devient vite obsédant (l’excellent Le Jeu m’a Lâché et son pattern d’une batterie se révélant plus d’une fois fort convaincante), s’élève vers plus de lumière (Aride), se montre incisif ou plus vaporeux. La fièvre est trouble, changeante, déroutante parfois, très électrique toujours. Rimel inocule son venin sur la longueur. L’effet est sûr, durable, entêtant et mine de rien, propose un disque singulier qui remet Thionville sur la carte du rock.

SKX (10/05/2023)