cindercone

Cinder Cone
s/t – LP
self-released 2023

Du fin fond de Los Angeles – oui du fin fond parce qu’on peut venir d’une ville archi-connue et être totalement anonyme, évoluer sous aucun radar à la mode – Cinder Cone publie son troisième album à 250 exemplaires. Un duo confidentiel qui ne fait rien pour que ça change. Dix ans de silence, ça n’aide pas. Après l’excellent Cattaraugus en 2013, David Foley (batterie) et, un nom qui sonne bien de chez nous, Anthony Fournier (guitare, chant) ressortent de leur tanière et il serait vraiment dommage de ne pas en profiter car l’animal se fait rare, intriguant et rudement attirant.
Minimaliste et aride, véhément et anguleux, accablé et mélodique, les compos du duo ne laissent jamais insensibles. Cinder Cone navigue à sa manière sur des terres voisines de Lowercase, autre groupe californien qui avait aussi commencé en tant que duo, trouve son équilibre entre écorchures et explosions, gravitant autour de quelque chose de rude et douloureux, se nourrit de slowcore et de Slint mais n’hésite jamais à durcir le ton, secouer le cocotier de la mélancolie n’ayant jamais le temps de s’étaler, tirer sur le fil de la tension jusqu’à ce qu’il casse. De fortes réminiscences 90’s d’un groupe dont la place n’aurait pas été usurpée sur le catalogue de Touch and Go et que le duo bonifie de son talent unique.
Guitare et batterie ont été enregistrées ensemble live. Le chant qui n’est jamais dominant et le violoncelle (par l’invité Colin Frangos) sur Fisherman’s Friend ont été rajoutés ensuite. Le rendu est près de l’os, sonne abrupt, sans esbroufe, sec et abrasif. Mais Cinder Cone prend son temps pour raconter ses morceaux. S’émancipe du cadre, joue avec l’intensité, les nerfs, reste constamment sur le qui-vive, insuffle de la chaleur, une tristesse sans apitoiement, hurle sa peine, balance des coups d’éclats, densifie le propos avec le grain de la guitare qui épaissit de la part d’un duo sachant cogner sans ménagement plus d’une fois, déroule son blues avec la force du noise-rock, aussi sobre soit-il mais riche d’un paquet de riffs et de rythmes aussi complices que très marquants. Un jeu parfaitement articulé, des compos avec du caractère et s’incrustant durablement jusqu’à ne plus vouloir partir. Cinder Cone mériterait amplement de ne plus être un secret bien gardé.

SKX (26/12/2023)