bigbrave
thrilljockey


Big|Brave
Nature Morte – LP
Thrill Jockey records 2023

C’est direct dans le vif du sujet que Big|Brave entre avec Carvers, Farriers And Knaves. Pas de round d’observation, pas de longues vibrations ornées d’électricité ténébreuse pour chauffer l’atmosphère mais les cordes vocales de Robin Wattie et toute la lourde artillerie du trio canadien qui vous cueillent brutalement à froid comme si le morceau était pris en cours. Pour un disque intitulé Nature Morte, c’est un début fracassant et plein de vie.
Sans rompre avec son style habituel, il est permis d’avancer que ce sixième album débute avec un surplus d’explosivité et de sourde violence trouvant son prolongement dans le second morceau The One Who Bornes A Weary Load. Et effectivement, la charge est lourde. Mais Big|Brave la porte avec toujours autant de bravoure, de pureté brute et de profondeur déchirante. Une colère plus prégnante, une arme sinueuse et tourmentée qui ne quitte pas vraiment Nature Morte. Excepté le temps des deux titres les plus courts, My Hope Renders Me A Fool et The Ten Of Swords, pièces de noise plus abstraites et contemplatives. Les quatre compositions restantes, même quand l'intro est à l'apaisement sur The Fable Of Subjugation, sont quatre déflagrations majestueuses, à mèche plus ou moins lente mais toujours intenses et crépitantes, avec des tonnerres de batterie (Tasy Hudson), des grands coups de massue sur les cymbales, des grondements descendants directement de lointaines et mystérieuses montagnes, un riff par morceau, deux quand c'est la fête, qui se prolonge, se propage, se répète, se tord, l'écho qui se répercute contre des parois immenses. Toute une texture de guitares (Mathieu Ball et Wattie), feedback, distorsions, larsens contrôlés, un fatras de cordes rouges feux et d'écorchures jusqu'au sang malaxés de main de maître par le producteur Seth Manchester. L'approche minimaliste du trio n'a jamais paru aussi dense, tumultueuse, épique, âpre, douloureusement belle et paradoxalement, presque plus accessible et variée. Et le chant à fleur de peau de Robin Wattie est comme toujours primordial dans ce sentiment contrasté que la musique de Big|Brave est aussi pesante qu'aérienne, tragique et lumineuse, grave, épaisse que vient transpercer l’aigu et l’urgence d’un chant qui est pour beaucoup dans le magnétisme de la musique de Big|Brave, impérieusement attirante.
A l’instar de Vital et de tous leurs précédents enregistrements, on sait où on met les pieds avec Nature Morte mais Big|Brave arrive une nouvelle fois à être subtilement différent et captivant.

SKX (24/02/2023)