schleu
cheapsatanism
degelite
jarane
letourneur
lhygienesonore
prixlibre
rockerill
piedebiche


Schleu
Lying In The Wrong Coffin – LP
Cheap Satanism/Degelite/Jarane/L’Étourneur/L’Hygiène Sonore/Prix Libre/Rockerill/Pied De Biche/Poutch Militaire records 2022

Schleu, c’est un regroupement de la diaspora lyonnaise, celle qui résiste avec bruit et fureur à toutes formes d’académisme et d’embourgeoisement. Avec des membres de groupes dont on ne sait s’ils sont toujours en activité ou non et qui sont particulièrement appréciés comme Tombouctou et Torticoli mais aussi Burne, Neige Morte, Plèvre, Garmonbozia et Süryabonali. Schleu (je leur souhaite une belle tournée en Allemagne) débarque comme un troupeau de chiens enragés dans un jeu de quille aux grosses pointes rouillées. Pas de quartier et des morts de chaque coté. Lying In The Wrong Coffin, premier album avec plein de légumes qui donnent envie de les éclater sur des têtes de gamins blondinets, parce que ça fait du bien et parce que faut pas chercher à comprendre. L’anarchie débordante et jouissive de Lying In The Wrong Coffin n’obéit qu’à une seule règle, aller où bon leur semble en prenant un maximum de plaisir. Sur son front perlaient des gouttes de flan.
Association déglinguée de courants contradictoires, de pentes ascendantes et de turbines alternatives, démolisseur de certitudes, ce disque est une énorme secousse rock qui ne surprendra personne qu’elle fût mixée et mastérisée par Psychic Graveyard. Quand il s’agit de faire du bruit tordu, vicieux, déranger les habitudes et provoquer du malaise, la bande de Eric Paul se pose là. Schleu a pu bénéficier de leurs mains expertes et leurs oreilles de mutants pour étaler une science cousine lointaine mais bien personnelle de la dissonance qui brûle les neurones, de l’agitation imprévisible et de la baffe qui claque (et inversement) quand on ne s’y attend pas. L’impression d’être plongé dans une lessiveuse siphonnée se dissipe rapidement. Cette no-wave d’un genre nouveau, généreuse et loquace, plus orgasmique que flippante, libère de la furie ludique regorgeant d’accroches balancées à toute berzingue, qui ne durent pas mais qui sont bien réelles. C’est rapide, ça fuse de toutes parts, ça déborde, le tumulte est monstrueux, les changements de plans incessants et les idées jaillissent plus sûrement qu’un jeune volcan. Mais tout est sous contrôle. Sous la déflagration constante, Schleu retombe toujours sur ses pattes. Et n’a peur de rien comme allez voir par trois fois au-delà des cinq minutes alors que cette musique semblait tailler pour la saccade brève et foudroyante. C’est que Schleu n’a pas la vue courte. Imagination intarissable et d’une grande richesse azimutée, capable d’un morceau comme False Advertising au groove rebondissant et aliénant avant de se répercutant dans des répétitions au calme trompeur.
Et entre accélérations carnassières, guitare diabolique, accidentée, déroutante et autres turpitudes aussi frénétiques que cassantes, la chanteuse qui répond au surnom de Gundrun 23 créditée aux vocals et Joie de vivre (et qui s’est déjà fait entendre dans Le Death To Mankind) n’est pas la dernière pour mettre de l’huile sur le feu. À ce niveau là de nuisances, c’est même de la haute couture. Du sur-mesure, un défouloir qui est pour beaucoup dans ce sentiment de dinguerie imprégnant Lying In The Wrong Coffin. Une performance de haut-vol crachant des mots au vitriol avec toute la perfidie, l’absurdité, le détachement et la colère pour ne citer que ces qualificatifs car impossible de faire le tour de tous les sentiments par lesquels elle passe et qu’elle nous renvoie dans la tronche. Shut your mouth less words more action. Dont acte. Lying In The Wrong Coffin, ça s’explique pas, ça se prend tel quel, c’est une putain de belle, renversante et intense tranche de vie singulière.

SKX (24/10/2022)