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Salo
From Melmac With Hate – LP
Bigoût records 2022

Melmac était le nom d’une planète fictive de la série télé Alf à la fin des années 80 et c’était plutôt pour les gosses. Ce que n’est pas du tout la musique de Salo. Sauf si vous voulez qu’ils deviennent des têtes brûlées ou des hyperactifs à tendance psychotique. Pochette en forme de gros clin d’œil au film La nuit du chasseur (1955) avec Robert Mitchum mais Salo n’a gardé que le hate, on verra plus tard ou pas du tout d’ailleurs pour Love. Vu comme ça, From Melmac With Hate est une étrange association de concepts incompatibles. Ce que Salo, nouveau trio lyonnais, balaie d’un vif et vigoureux revers de main.
Noise-rock, punk avec des inclinaisons garage (mais il est permis d’inverser/mélanger l’ordre de ces qualificatifs), Salo déboule dans le paysage telle une boule de feu dans un champ de coton et ça devient rapidement impossible à circonscrire. Vu en concert le vendredi 25 février dernier au Marquis de Sade (Rennes), l’album arrive à dégager une intensité qui rappelle fortement la scène. C’est un bel exploit (la captation dans des conditions live à Grrrnd Zero Concert Room n’est évidemment pas étrangère à cette sensation). Avec toutes les subtilités requises supplémentaires qu’un enregistrement permet parce que ce premier album n’est pas seulement une question d’énergie que Salo a viscéralement collé au corps, c’est une tonne d’accroches cuisinées à feu soutenu sans jamais se brûler les mains. Salo file grand train mais n’a pas oublié les mélodies en route, des mélodies corrompues creusant des sillons qui ne vont qu’en s’accentuant dans le plaisir acide et le tourbillon irrémédiablement entraînant. La rythmique (Charlotte Desigaud, basse et Samy Delabre, batterie) inarrêtable vous promène de long en large, ne vous lâche pas, bouscule et vivifie. Et quand Salo semble se poser et que le ton se fait plus grave sur le magnifique Tasmanian Tiger (for Nikita), la tension est toujours là, l’effervescence prête à vous ensevelir de sa main chaude et néanmoins bienveillante.
From Melmac With Hate grésille, ne cherche pas à polir, se joue de la saleté comme des codes du garage-rock pour l’amener dans des retranchements et déhanchements plus noise, durs, anguleux, volontaristes aussi parfois en fonçant dans le tas sans se retourner (Guillotine, Fakir, Speed Missile). Le chant du guitariste Romano Krang à la tonalité particulière semblant évoluer dans des sphères où l’oxygène vient à manquer, perçant, névrosé, participant aussi à brouiller les pistes tout en rajoutant une couche de frénésie. Mais ce qui ressort de tout ça, c’est le sens acéré du rock’n’roll que Salo possède comme une seconde peau qui sent le vieux cuir avec de la classe par-dessus pour écrire des morceaux comme Algeria, Knee KO, Raptors Cult ou encore le long Dick Hunter au parfum plus psychédélique qui en disent long sur le talent du trio. From Melmac With Hate et avec tout notre amour.

SKX (09/05/2022)