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kasumuen
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Bodies
Ghost Hoaxing – LP
Kasumuen records 2022
Des Bodies, c’est pas ce qui manque, ça traîne de partout.
Un nom qui jonchent les rues mais notre Bodies du jour qui vient de Melbourne,
vous n’en trouverez pas un aussi sauvage et brutal. Les muscles sont
solides parce qu’ils sont soumis à rude épreuve. Bodies
ne fait pas mine de hurler, de taper ou s’arracher la peau sur des
cordes très électriques. Un groupe très nature ne
s’encombrant pas de détails. Une lourdeur innée, une
abrasion constante. À tel point que le titre d’introduction
Drowned peut faire penser à du Part Chimp des Antipodes.
Ce son qui gifle et craque en même temps, sale, teigneux jusque
dans le cheminement du morceau qui marque l’humeur général
d’un album placé sous le sceau d’un noise-rock à
tendance grunge dans le sillage d’un Karp. Et punk aussi quand il
s’agit de s’énerver franchement. La plus belle démonstration
s’appelle The Great Equaliser. Une grosse minute où
la batteuse Liz Turner prend le micro et gueule tout ce qu’elle peut
en finissant par une série de fuck you propice à
calmer les ardeurs des pus téméraires. Un nom qui vous dit
peut-être quelque chose. Elle est aussi la batteuse de If
So Why et feu-Lost
Talk. C’est la dernière arrivée au sein de Bodies,
groupe constitué de Joel Morrison (guitare, chant principal) et
un bassiste qui se fait appeler Swiss, duo de base qui existe depuis plus
de dix ans et qui a usé plusieurs fessiers derrière la batterie.
Mais Ghost Hoaxing n’est que leur second album débarquant
dix ans après le premier en 2012. Un long silence que Bodies met
à profit pour augmenter la puissance d’un feu ne demandant
qu’à se répandre. Bodies ne calcule pas, le chant sort
souvent comme il peut (jusqu’à s’ébrouer sur Clockwork)
et c’est joué avec passion et conviction car Bodies a le coeur
gros et généreux. C’est donc pour cette raison que
le trio n’oublie jamais d’entourer toute cette force primaire
d’une aura mélodique avec une guitare possédant cette
mince couche de graisse pour que ça glisse mieux, de verser dans
un blues âpre avec Wolves, reprise d’un certain John
Dickson, de doser les frappes et le rythme global dans des morceaux plus
appuyés que véloces, d’extraire un jus sombre plus
déchirant pour faire saigner d’autres sentiments d’une
extrême colère qui n’est jamais feinte quand elle s’exprime
à plein régime. Un disque tiré uniquement à
200 exemplaires avec une pochette unique à chaque fois dessinée
par le guitariste. Un genre de bouc rose à poids gris a traversé
les océans pour arriver en Bretagne. C’est pas pour faire
du tourisme parce que ce disque va régulièrement tourner
sur la platine.
 
 
Et comme l’Australie c’est loin, autant que ce beau vinyle ne
fasse pas le voyage pour rien. Le premier CD de Bodies était dans
la soute et c’est également du très bel ouvrage. Le
son n’est pas aussi violemment abrasif mais la qualité des
compos est déjà présente et elles valent le coup
d’être entendues. Espérons maintenant que Bodies n’attend
pas à nouveau dix ans pour se manifester.
SKX (17/03/2022)

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