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Stella Research Committee
A Proposed Method For Determining Sanding Fitness – LP
Self-released / Cruel Nature records (tape) 2021

Le Comité de Recherche Stella. Tout ça annonce un disque très sérieux, tendance prise de tête, limite barbant. Surtout quand le titre propose une méthode pour déterminer... l’aptitude au ponçage ? C’est vraiment ça la traduction ? Ça sent l’entourloupe. Et pourtant, la musique de ce trio de l’Ohio (avec des membres éparpillés entre Cincinnati et Columbus) n’est effectivement pas un cadeau. Ou alors celui que vous aimeriez offrir à votre meilleur ennemi.
Stella Research Committee, qui se faisait appeler avant uniquement Stella et qui a sorti quatre enregistrements sous ce nom simple, n’a pas innocemment compliqué la donne avec un patronyme à rallonge qui sent le thésard et un titre d’album nébuleux. Le trio a décidé de passer la vitesse supérieure dans le domaine de l’éclatement des structures, de la liberté des tonalités et de l’angoisse qui ronge progressivement le cerveau. A Proposed Method For Determining Sanding Fitness est une musique difficile, hermétique où se dressent de multiples pics hostiles et inconfortables mais elle mérite fortement qu’on s’y accroche. Dans Stella Research Committee, il y a research et c’est sans doute le mot le plus important. Un trio qui cherche des voies singulières, quitte à qu’elles soient escarpées et casse-gueule.
Kevin Hall (chant, guitare, piano), Tony Squeri (synths, programming) et Lauri Reponen (batterie) invoquent les grands esprits de la no-wave, se confrontent au noise-rock le plus intransigeant, infligent un traitement free-rock, déstructuré, atonal, répandent des flux électro et expérimentent toutes ces données dans des compos heurtées, déchiquetées, stressantes et intenses qui sont de véritables bombes à retardement. Et qui n’explosent pas vraiment mais propagent un sentiment d’insécurité constant, mettent mal à l’aise, excitent le nerf, le grattent sans l’achever. Des fragments de guitares, des mélodies piétinées, des claviers martelés ou balançant des bruitages crispants et épineux. Ça avance dans un parfum de chaos, le rythme erratique, une pulsion incontrôlable, une convulsion tachycardique mais avec toujours une tension rock, un chant plein de tourments prêt à mordre ou crier à l’aide, un fil invisible qui maintient cet assemblage ardu en un poing serré efficace tournoyant aléatoirement dans un ciel orangé laissant une drôle de traînée de soufre dans son sillage et des titres marquants comme Murdur, Nails et River Rd. Mis à part quelques menus passages plus flottants et incertains, Stella Research Committee frappe un joli coup d’une perversité aliénante, un cauchemar qui ne cesse de grandir en vous pour se révéler bien plus attirant que de prime abord, un beau disque de cinglés méritant vraiment de s’y plonger.

SKX (21/05/2021)