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Pauwels
Toli – LP
Araki/Poutrage/Vox Project/October Tone/Collectif Ödl/Lab records 2021

Pauwels a toujours été un animal relativement insaisissable. A tel point que leur précédent disque paru en 2019, Poena Cullei, a été zappé et qu’on était resté sur leur split avec Uns en 2016. Mais il faut surtout le comprendre en référence à la musique de ce groupe indéfinissable. Il a toujours été fortement palpable que Pauwels (originaire de Mulhouse) n’aimait pas évoluer dans un cadre bien défini. Post-rock, math-rock, noise-rock agrémentés de déviances atmosphériques et autres courants transversaux, le quatuor naviguait sans choisir, s’amusait, explorait, testait. Il n’a fait qu’accentuer, peaufiner, améliorer cette tendance jusqu’à Toli qui fait figure de franche réussite.
Il était une fois la matière sonore. A partir de là, tout est possible avec Pauwels. Et si le groupe reste focalisé sur une approche noise et rock, dissonante, très rythmique et parfois mélodique, la manière d’assembler tous un tas de sonorités disparates et de jouer avec amène Toli dans des sphères plus personnelles, énigmatiques, attirantes. Pauwels crée des espaces qui lui sont propres, des silences qui en disent long, des fulgurances qui déchirent tout.
Toli ne commence pourtant pas avec sa face la plus séduisante avec les sept minutes de N 48° 34' 41,195"-E 7° 42' 6,896". Pour un titre qui ressemble à des coordonnées GPS, c’est déboussolant, n’annonce pas ce qui va suivre qui sera bien plus abrasif, agité et prenant mais dit tout de l’esprit expérimental qui anime Pauwels. Après ce morceau introductif un peu longuet où il est permis d’entendre sur la fin des bribes d’un concert celtique en Bretagne et des mâts de bateaux sous le vent, les choses sérieuses commencent réellement avec Angelo. Le morceau le plus court et violent évoquant un certain esprit Deity Guns, voir Bästard (et ce n’est pas le seul moment). Pauwels s’arc-boute sur ses instruments. La tension monte de plusieurs crans. Les guitares crissent. Les stridences et le bruit vous happent et ne vous lâchera plus. Après, c’est l’option grand format, des compos s’étalant au-delà des cinq minutes, du relief qui promet de belles émotions, trois morceaux en un avec des parties très différentes s’imbriquant entre elles pour former un long paysage sonore intense et envoûtant (Giacomo), de fragiles accords pour lancer la cavalcade infernale (Olga) d’un disque décidément très marqué par la percussion et des compos fortement changeantes mais toujours cohérentes. La fin n’a pas souvent de rapport avec le début et le milieu reste déroutant. Mais tout se tient, est tendu avec des riffs qui comptent et des idées qui marquent comme sur le somptueux Mahlowne possédant un sacré charisme.
Des effluves d’un psychédélisme noire, d’une musique industrielle sentant les ruines et une sourde rage sur fond de tôles concassées, des synthés qui couinent, une autoharpe, un piano, un xaphoon et un krar (j’en sais fichtre rien ce que c’est mais ça participe sûrement très bien à tout le bordel ingénieusement mis en place), une voix fantomatique surgissant trop rarement, c’est toute l’ambition d’un groupe convertissant ces différents éléments dans un disque sonnant finalement très rock mais à leur manière. Toli, qui signifie miroir en langue mongole, renvoie l’image d’un groupe qui a trouvé la bonne formule et surtout une divine inspiration pour nous embarquer sans coup férir dans les méandres de leur cerveau bouillonnant.

SKX (04/10/2021)