bummer
thrilljockey


Bummer
Dead Horse – LP
Thrill Jockey records 2021

Au moins, il est impossible de reprocher à Bummer de ne pas être toujours à fond et faire comme si demain n’existait pas. Parce qu’après, on pourrait reprendre quasi mot pour mot la chronique de leur premier album Holy Terror, on n’y verrait que du feu. Et le feu, ça brûle. Tout comme Bummer.
Dead Horse réveillerait un âne mort. Vingt-huit minutes et onze morceaux d’équarrissage féroce dans les grandes plaines sauvages du noise-rock, celles qui ont été balayées par tous les courants mais qui restent fermement enracinées dans la tradition, à peine une touche de stoner au lance-flamme, surtout ne pas complexifier, faire dans le basique et le brutal. Le sang dévale à flot donc. Rien de nouveau sous le soleil de Bummer. Rien de nouveau sous le soleil tout court. Et c’est ainsi qu’il faut prendre le trio de Kansas City. Comme une machine à riffs, une machine à tabasser, une machine à beugler. Du primaire et du velu qui balance toute leur méchante colère entre les deux et trois minutes réglementaires avant de passer au suivant sans transition puis reproduire le même schéma jusqu’à plus soif qui dure pas plus qu’il ne faut. Bummer est lucide.
Et à ce petit jeu là, Bummer a sans doute élevé le niveau des compos tout en restant les pieds bien au sol. Des riffs qui piquent les flancs, un refrain un peu plus tueur, à toute berzingue mais avec une clairvoyance accrue, une hargne rock’n’roll, une façon d’enchaîner et foncer dans le tas à la Metz mais avec les semelles très crottées, un groove lourd et carnassier qui ferait danser un hippopotame, des décrochages pimentés par des samples empruntés à des films de Stanley Kubrick et Otto Preminger (Bummer a le droit d’avoir un peu de culture) qui rendent plus beaux et intenses des morceaux comme False Floor et Rareware, un soupçon d’intro acoustique avant d’envoyer la cavalerie habituelle sur Magic Cruel Bus et encore et toujours des tunnels de riffs cruels, des locomotives de basses en pleine gencives avec un brin d’humour dans les titres pour faire passer la grosse pilule (I Want To Punch Bruce Springsteen In The Dick). Et comme si ça suffisait pas, deux invités pour pousser la beuglante sur une poignée de titres avec Sean Ingram (Coalesce) et Matt King (Portrayal Of Guilt). Ne pas le savoir n’aurait rien changé à l’affaire parce que la sensation de tornade ne change pas. On sait où on met les sabots avec Dead Horse mais c’est une saine ruade qui fait du bien par où ça passe.

SKX (27/09/2021)