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Adulkt Life
Book Of Curses – LP
What’s Your Rupture records 2020

Il ne faut parfois pas grand-chose pour qu’un groupe attire l’attention et se fasse un nom. Pour Adulkt Life, le mot de passe est Huggy Bear. Un groupe qui ne parlera qu’aux plus anciens et férus d’archéologie puisque ça fait remonter à plus de vingt-cinq ans en arrière, entre 1991 et 1994 exactement. Mais qui a laissé une trace dans les mémoires en étant partie prenante du mouvement Riot grrrl, variante anglaise. Le lien s’appelle Chris Rowley, chanteur de Huggy Bear (avec Niki Elliott au chant également et deux autres filles sur le total des cinq membres sinon ça fait bizarre de mentionner un groupe assimilé riot grrrl alors que c’est d’un mec dont on cause) qui a décidé à cinquante-cinq ans de revenir dans le circuit après s’être totalement rangé des bagnoles. Le monde va-t-il si mal que ça ? Sans doute que oui pour Rowley qui reprend le micro pour raconter tout ce qui lui pèse sur le cœur et le fout en rogne parce que faut que ça sorte et il a encore rien trouver de mieux qu’un bon vieux groupe de punk pour cracher sa bile et faire entendre sa voix.
Un disque où il est d’ailleurs beaucoup question du fait de vieillir et se revendiquer punk à plus de cinquante balais alors qu’on est père de famille avec des gosses, continuer à ouvrir sa gueule alors qu’on est inséré dans le système. Chris Rowley a écrit tout un laïus sur ça, écrit en tout petit en haut à gauche au verso de la pochette et largement développé lors d’un texte figurant sur l’énorme poster avec les paroles de l’autre coté. Un truc qui part d’une croyance comme quoi, à partir d’un certain âge, on ne peut plus être punk, aller à des concerts punk, cesser toutes activités dans ce milieu, que ça devient gênant. Mais comment abandonner une culture, la culture qui t’a façonné dit-il, c’est comme se résigner à se dire que nos meilleures années sont derrière nous. Et ça, Rowley ne peut pas l’admettre. J’en connais d’autres…
Mais Rowley n’a pas besoin de se justifier pour reprendre du service parce que la musique parle d’elle même. En compagnie de John Arthur Webb (guitare) et Kevin Hendrick (basse) qui ont déjà pas mal bourlingué et joué ensemble au sein de Male Bonding et Pre et le plus jeune Sonny Barrett à la batterie, ce groupe qui ne s’appelle donc pas Adulkt Life par hasard publie une musique à cran, raide, urgente, vive, insoumise, bref du punk et ne coller pas post devant parce que ces gars là ne viennent d’aucune scène et comme ils disent, n’ont pas pris le passé musical en otage, le leur et n’importe quel autre, pour faire Adulkt Life. Rowley chante de son phrasé plus ou moins parlé et intense sur la déception constante d’être un adulte, sur le rythme cruel de la vie qui est retranscrit sur une poignée de morceaux à la cadence plus mesurée, voir chancelante avec certaines ambiances plus mélancoliques. Mais s’il est désormais plus nuancé dans sa critique, cela n’empêche pas Book Of Curses d’être un album majoritairement mordant et trépidant, dressant des barbelés avec la guitare sur des compos concises et percutantes qui jamais ne sentent le moisi et pourraient en remontrer à bien des jeunots. Punk is not dead. Never. C’est juste toi qui devient un vieux con.

SKX (23/04/2021)