wren
gizeh


Wren
Groundswells – LP
Gizeh records 2020

La première rencontre avec Wren remonte à 2015 et un split avec Irk. Une rencontre sans suite alors que cela s’annonçait prometteur. Si cette gazette était un peu plus professionnelle, le mini-album Hoist en 2016 et Auburn Rule l’année suivante seraient alors tombés dans l’escarcelle et Groundswells n’aurait pas déboulé en créant une énorme surprise de bonheur. Les promesses ont explosé dans les grandes largeurs.
La version digitale qui n’a pas peur d’un virus taquin rappelant à l’homme qu’il n’est qu’un minuscule cloporte insignifiant est sortie en juin, a squatté les tympans tout l’été et quand le sobre vinyle a enfin été publié en septembre, il a rapidement pris demeure sur la platine pour ne plus la quitter.
Le talent de ce groupe londonien ne réside pas dans le fait de composer une musique spécialement nouvelle. Neurosis, Kowloon Walled City et toute une ribambelle de groupes post-metal/sludge/hardcore dites le comme vous voulez sont clairement dans la ligne de mire. D’ailleurs, pour mettre toutes les chances de son coté, Wren a fait appel à Scott Evans (chanteur-guitariste de Kowloon Walled City) pour l’enregistrement et Magnus Lindberg (Cult Of Luna) pour la mastérisation. Filière classique.
Non, l’important est que Wren arrive toujours à faire passer le frisson malgré un cahier des charges connu, qu’il emballe les six compositions au long cours dans un écrin magnifiquement vibrant qui vole loin au-dessus de toutes autres considérations, des morceaux à l’architecture élaborée avec une telle dextérité qu’ils transforment instantanément les affaires courantes et très usitées en nouvel eldorado.
Chromed qui inaugure cet album, c’est leur Locust Star à eux. De la lourdeur n’écrasant jamais, un rythme tribal, un allant majestueux pulsé par une batterie qui se déchaîne méchamment par saccades et le travail de deux guitares fines mélodiquement éclairant la fin d’un titre magnifiquement intense. L’entrée en matière prend à la gorge et Wren ne desserrera plus l’étreinte. A chaque morceau, Wren trouve l’harmonie, le riff, la mélodie magnétique, les chants qui hérissent le poil et la sonorité qui transcendent, embrasent, ouvrant la musique à plus de lumière, plus de grandeur à travers les ténèbres pour des compos violemment belles qui giflent comme une tragédie. Sur les dix minutes de Subterranean Messiah, l’ajout de voix célestes de Tiffany Ström et Syd Scarlet (Fvnerals et Myyths) et le violoncelle de Jo Quaid peuvent paraître un peu trop onctueux mais prennent tout leur sens sur la longueur et en opposition avec le reste du titre marquant au fer rouge et des répétitions carnassières qui mettent à genoux. Ce qui est la position préférentielle à l’écoute de Murmur, Seek The Unkindred ou The Throes qui nous font sentir tout petit.
Groundswells
le bien nommé. Une immense lame de fond redoutable dont on connaît la provenance mais impossible à éviter, qui submerge sans coup férir, charriant des tonnes de sentiments en noir et blanc, qui tape dans les tripes, remue la boue, tout ce qu’on ne veut pas voir pour le convertir en un matériau vulnérable, farouchement tourmenté, très étudié et sombrement lumineux. Une pièce remarquable qu’on a pas fini de polir.

SKX (14/10/2020)