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Remote Viewing
It’s Better This Way – CD
self-released 2019

Palehorse ne galope plus depuis 2016 et le cultissime album Looking Wet In Public. Découvert sur le tard, il ne faudrait pas que cela arrive également avec Remote Viewing qui a publié fin 2019 son déjà deuxième album après Blood Loss sur Hominid Sounds en 2018. Remote Viewing, c’est pratiquement tous les membres de Palehorse avec John Atkins (basse), James Bryant (guitare) et Nikolai von Stieglitz (chant) mais également Tom Fowler qui était le guitariste de Palehorse sur le tout premier des quatre albums de Palehorse sans oublier la participation de Seedi sur un titre (High Level Gutter Clearance) qui était le chanteur originel de Palehorse. De là à dire que Palehorse et Remote Viewing, même combat, il y a fossé qu’il est tentant de franchir. Remote Viewing laboure en tout cas un créneau identique, celui qui fait souffrir les chairs, là où noise-rock, sludge, post-hardcore et metal se télescopent dans un immense fracas assourdissant et laissent hagard.
It’s Better This Way, c’est eux qui le disent et rien de mieux à l’heure actuelle qu’un Wayne Adams au Bear Bites Horse studios pour leur donner raison. Un enregistrement qui vous rentre dedans, écrase, tape dans le bide, le remue de l’intérieur et confère une puissance indestructible. Sûr de cette force, le groupe anglais avec un grec à la batterie (Dimitris Fotis Sakellariou, ex-I Want You Dead) assène de grosses plâtrées déchirantes, un torrent de boue avec plein de fissures à l’intérieur pour que la lumière passe, une intensité qui rend maboul, une lourdeur implacable. La densité est énorme, l’espace méchamment occupé, bien plus que sur Palehorse, impossible d’y mettre le bras sans se retrouver avec un moignon.
Deux guitares qui tronçonnent comme sur l’introductif et impressionnant They Never Made It Home couplé de main de maître avec The Tissue Issue. Une basse dantesque jouée avec un marteau. Des chants qui se multiplient et hurlent leur douleur. L’impression d’être assailli par tous les cotés. Et que la folie vous frappera avant la fin des huit compos qui prennent leur temps pour délicieusement vous torturer. Car ce qui est encore meilleur chez Remote Viewing, c’est que l’attaque frontale et le rouleau-compresseur ne sont pas les uniques tactiques. Une propension à ralentir, imprimer un rythme lancinant qui rend l’atmosphère encore plus malsaine et poisseuse. Et dramatique aussi. Il faut toute la brillance de certains arpèges, les touches d’un piano (Like Forest Fire) et des passages plus Slint-ien/post-rock pour que la noirceur ne nous submerge pas. Constructions épiques et machiavéliques qui exacerbent la tension dont l’apothéose sont les huit minutes finales de Let The Oil Soak Out qui est sans cesse au bord de l’explosion et se termine par de subtils accords à la place d’un déluge de feu. It’s Better This Way, ce n’est pas seulement eux qui le disent. Album colossal.

SKX (04/10/2020)