meatwound
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Meatwound
Culero – LP
Financial Ruin records 2019

Meatwound a sorti le bouc maléfique, la bête immonde qui a le mauvais oeil avec un énorme poster au cas où le message n’était pas suffisamment clair et une déclaration sans ambages blanc sur noir annonçant faire ses besoins sur la croix. Sauf si elle est à l’envers. Meatwound n’a pourtant jamais été un groupe de black metal, montré des signes aussi évidemment sataniques mais il faut que ça sorte et l’extrême, ça les connaît.
En deux albums, Addio et Largo, le groupe de Tampa (Floride) a ratiboisé la moitié des surfaces forestières de la planète au doux son d’un noise-rock/punk-hardcore brutalement décapant. Le compromis est un mot absent de leur vocabulaire. Et ce n’est pas Culero, titre d’album éminemment poétique dans la langue de Cervantes, qui dira le contraire. Meatwound appelle un chat un chat, en veut à la terre entière et musicalement, c’est un combat de tous les instants.
Et pourtant, Culero ne va pas plus loin dans la surenchère de violence. Il est vrai qu’il était difficile de faire pire (dans le meilleur) que Largo. Meatwound reste cette machine de guerre très très impressionnante. Ne pas rester sur leur passage est un signe de bonne santé mentale autant qu’un réflexe de survie essentiel. Mais on sent comme poindre une envie de discernement, une volonté de varier les plaisirs et de faire respirer la bête qui ne sommeillait pas en eux puisque ça fait longtemps qu’elle était réveillé et avait explosé façon dynamite. L’exemple le plus marquant est Elders. Cinq minutes d’un instrumental avec un synthé/orgue, une ligne de basse centrale et obsédante, un psychédélisme étrange planant sur une tension dont la détonation est attendue, semble imminente et ne serait pas surprenante vu la fougue habituelle des gaziers mais Meatwound en reste là. C’est une approche totalement inédite et c’est une belle réussite. Monday, du haut de ses deux minutes à peine représente également une démarche plus expérimentale renvoyant aux désirs bruitistes/purement noise du groupe qui s’invente ainsi de nouvelles perspectives.
Et si les huit autres titres montrent le visage de Meatwound que l’on connaît et apprécie fortement, des reliefs plus accentués se font jour, des contrastes amènent une dynamique encore plus vivifiante à l’instar du génial Nightmare Farm, comme un mix incroyable entre la technicité d’un Dazzling Killmen et la rage d’un Deadguy, avec cette basse décidément considérable et toujours très inspirée, une valeur sûre chez Meatwound. Le chant typé et velu amène Meatwound sur d’autres territoires musicaux mais c’est la première fois que je ressens à l’écoute de Culero les influences des groupes précités (liste qui ne s’arrête pas là), ce background musical que Meatwound recrache avec force et pertinence dans un paquet de morceaux qui sont autant de cyclones dévastateurs méchamment et intelligemment conçus. Culero, nouvelle sacré branlée de la part d’un groupe, une fois vos peurs domptées, méritant votre plus grande considération.

SKX (12/01/2020)