facs
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Facs
Void Moments – LP
Trouble In Mind records 2020

Troisième album en trois ans, Facs ne connaît pas la crise. Mais les dividendes sont variables. La marge est mince. Les débuts avec Negative Houses avaient été prometteurs. Lifelike a été beaucoup plus mitigé. Et comme la vie est (parfois) bien faite, Void Moments tombe pile entre les deux, comme une synthèse des meilleurs aspirations et ceux qui donnent raison au titre Void Moments qui tend la perche pour se faire battre, des morceaux stériles et fades.
Boy ouvre pourtant magistralement l’album. Le trio de Chicago retrouve la tension qu’il avait égarée sur Lifelike, en rajoute même une couche en proposant le morceau le plus mordant de son répertoire à ce jour. Et accessible et mélodique aussi sans se départir de cette noirceur et gravité suintantes avec une rythmique tribale et un gimmick de guitare scintillant. Quand Teenage Hive enchaîne avec cette ferveur retrouvée, il est même permis de se dire que ce Void Moments va être un grand cru tant Facs semble avoir mis du nerf dans son rock ténébreux et aventureux, un post-punk qui n’a rien à voir avec le passé en s’affranchissant largement des aînés tout en gardant l’esprit expérimental pour créer un son qui lui appartient, ciselé avec amour et de multiples effets.
Cependant, Facs ne tarde pas à être rattraper par ses démons. Va encore pour le suivant Casual Indifference qui porte assez bien son nom. Le début de la transition. Car toute la seconde partie de l’album est moins heureuse. Le liquide Version et ses six minutes font basculer le disque dans une sphère incertaine malgré son sursaut bruitiste à la fin. La musique de Facs a toujours été louée pour son coté anxiogène et étouffant, cette emprise enveloppante qu’elle possède sur votre cortex sensitif tout en laissant échapper des stries de lumière. Mais des titres comme Version, Lifelike ou le pénible Dub Over révèlent une approche biaisée et laissent place à trop de confort dans cette fausse claustrophobie. Une densité chatoyante, une pièce qui retombe plus du coté de la décoration élégante que du malaise qui saisit et transporte, des nuages d’harmonies roulant des turbulences dans de vaines dissonances. Heureusement, le batteur Noah Leger est là pour tenter de maintenir la barque à flot (le tumultueux Void Walker). C’est plus que jamais la pièce centrale et angulaire qui abat un travail remarquable. Mais il fait également office d’illusion et ne saurait masquer le manque d’inspiration d’une bonne moitié de ce disque.
Void Moments s’attarde et nage dans des eaux troubles. En fait, tout comme pour l’album précédent, il manque sur la durée à Void Moments des chansons qui marquent, qui ont de la consistance. Facs compose avant tout des humeurs, sculpte des atmosphères comme des façades séduisantes derrière lesquelles il ne se passe pas grand chose. Void Moments, un disque malgré tout agréable mais qui ne donne pas envie d’y revenir.

SKX (23/04/2020)