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Downcast
Tell Me I’m Alive – LP
Ebullition/Three One G records 2020

Tell Me I’m Alive. Même eux ne semblent pas y croire. Oui, Downcast est en vie. A nouveau. Vingt-cinq ans plus tard. La réalité de ce titre d’album est bien plus tragique puisqu’il s’agit d’une phrase prononcée par un des survivants de la fusillade du 12 juin 2016 à Orlando dans une boite de nuit LGBT qui avait fait quarante-neuf victimes et c’est le sujet du morceau Hiding In The Limbs. Mais il est possible d’appliquer cette énoncé au groupe californien qui revient du cimetière des groupes ressuscitant régulièrement depuis un paquet d’années.
Downcast nous renvoie en 1990 au sein de la scène punk-hardcore-emo avec le label Ebullition qui en sera une vitrine importante en publiant les disques de Econochrist, Struggle, Portraits of Past, Still Life, Torches To Rome et des dizaines d’autres et bien sûr Downcast dont le premier single est aussi la première référence d’Ebullition. Downcast publie en 91 son unique album et puis l’aventure s’achève là. Un groupe qui ne m’avait jamais marqué à l’époque. Juste un nom parmi d’autres. C’est donc à ma grande surprise que je me retrouve à les écouter en 2020 et encore plus, à apprécier ce nouveau disque.
Downcast s’est réactivé en 2015 sans intention de capitaliser sur le passé mais bien pour poursuivre l’aventure, créer de nouvelles compos et continuer le combat d’un groupe au discours très politisé. Et autant dire que Downcast a du pain sur la planche. Sur les dix titres de Tell Me I’m Alive, quatre seulement ont été écrits après la sortie du premier album et n’avaient jamais été enregistrés. Downcast reprend donc le cours de son existence comme si c’était hier et Tell Me I’m Alive n’a rien d’un disque nostalgique et poussiéreux.
De cette époque, seuls restent les deux principaux protagonistes, Kevin Doss (chant, guitare) et Brent Stephens (guitare, chant et c’est lui qui créa également le fameux logo d’Ebullition). A la basse, c’est désormais Greg Doss (le frère de Kevin) et à la batterie Sean Sellers qui remplace Chris Hervey, batteur sur l’album de 91, poignardé en 96 par un rôdeur qui avait pénétré par effraction dans la maison de sa petite amie pendant la nuit.
Une musique toujours ancrée dans le hardcore que Downcast interprète avec puissance et émotion. Downcast ne renie pas ses racines, fait un clin d’œil à Fugazi sur un passage de From The Body, met tout son cœur et sa colère dans des morceaux engagés gagnant en richesse et en possibilités avec l’apport d’une seconde guitare, celle de Kevin Doss qui ne faisait que chanter au siècle dernier. Des morceaux plus travaillés, complexes, spacieux, déliés, racontant des histoires à la manière d’un Circus Lupus, avec des mélodies qui écorchent et distillent le frisson (le magnifique riff qui griffe sur Nature Of A Gun alors que les passages à la wah-wah faisaient craindre le pire ou sur le final de Four Arrows). Downcast se permet même des envolées lumineuses (Price), des arrangements au synthé, voir surprend carrément avec l’enjoué Mayday pas représentatif de l’ambiance générale mais qui finit par passer. Le dialogue entre les deux chants subliment l’urgence du propos. Les accords plus mélancoliques et délicats ne font qu’accentuer les décharges d’adrénaline. Downcast joue subtilement sur la tension, évolue en équilibre entre le tranchant et le fragile, entre le granuleux et le limpide qui dynamisent des structures adroitement élaborées. Downcast est plus que jamais vivant, reliant passé et présent pour aller de l’avant et accoucher d’un album qui a toute sa raison d’être en 2020.

SKX (17/05/2020)