spraypaint
12xu


Spray Paint
Into The Country – LP
12XU records 2019

Trois ans que Spray Paint n’avait pas réalisé un album sous son propre nom, en trio en tête à tête avec lui-même. Une éternité à l’échelle des Texans. Cory Plump, George Dishner (guitares/chants) et Chris Stephenson (batterie) ne sont pas restés inactifs pour autant. Ils en sont incapables. Collaborations tous azimuts. Rappel des faits pour les retardataires et les durs de la feuille. Avec The Rebel (le chanteur de Country Teasers), Ben Mackie (le chanteur de Cuntz), toute la bande de Protomartyr et Dan Melchior (Contributors). Spray Paint n’a pas eu le temps de rouiller.
Spray Paint reprend donc le fil de son histoire après Feel The Clamps et six albums entre 2013 et 2016. Et ce qui est rassurant ou flippant (c’est selon votre humeur), c’est que Spray Paint fait toujours du Spray Paint. Ni mieux ni moins bien. C’est à dire toujours excellemment. Ce qui n’est pas un mince exploit de conserver ce niveau d’exigence et de qualité. Il est toujours possible de trouver quelques menues variations et piques de nouveautés. Mais Into The Country reste du Spray Paint pur beurre et c’est un plaisir de l’étaler sur sa tartine post-punk d’un genre moderne.
Au rayon fluctuation, le trio a augmenté la dose de synthés et la sensation que les machines vampirisent leur musique et des guitares aux sonorités singulières. C’est joué avec un doigt, le majeur de préférence, comme sur Keep On Googlin’ ou le funèbre Bed Death, rajoutant de la pression et de la rigidité en s’intercalant parfaitement entre les guitares évoluant sur une tige de fer. Par contre, sur BRW’s Theme, le synthé devient plus ludique pour évoquer très sérieusement The Fall, seul moment plus guilleret d’un album qui ne va pas contribuer au réchauffement climatique.
Spray Paint a également accru la longueur moyenne des morceaux, jusqu’à presque atteindre les neuf minutes sur le final Cleaning Your Gun. Un titre au long cours implacablement répétitif, perturbé par les ondes austères et sifflantes du synthé, des kling métalliques venant des guitares au jeu minimaliste qui gratte l’épiderme et l’impression d’être embarqué dans un sous-marin qui ne refera jamais surface. De l’écho sépulcral, de la reverb angoissante, un chant détaché, une rythmique qui sent le piston d’usine. Into The Country sent le malaise et les sables mouvants dans lesquels leurs compatriotes s’enfoncent. L’album le plus anxiogène de leur riche discographie.
Heureusement, Spray Paint garde ce nerf coincé dans les crocs et ne se débarrasse jamais de cette approche frénétique et punk pour enrober chaque morceau d’une aura orageuse, entraînante, un engrenage irrésistible, une mécanique finement articulée et huilée et des zones d’ombre pour faire peur le soir venu. Into The Country, nouvel album indispensable de Spray Paint. Un de plus.

SKX (24/12/2019)