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Hebosagil
Fortuna/Kevät – LP
Full Contact/Ektro records 2019

Elle est loin l’époque où Hebosagil asséchait tous les fjords et capturait les élans à mains nues. Les étendues blanches sont calmes et infinies. La neige est reposante. La hache est cependant prête à l’emploi. Le glissement de terrain d’un hardcore-noise brutal vers des climats plus tempérés, recherchés et mélodiques s’est fait lentement mais sûrement. Et semble désormais irrémédiable. Heureusement, les Finlandais le font avec beaucoup de contrastes, de finesses et une sourde rage pour donner de la consistance à ce décor glacé, dans la continuité de l’album précédent.
Fortuna et Kevät, deux fois deux titres publiés respectivement en mai 2017 et juillet 2018 uniquement en version numérique. Full Contact, une sous-division du label Ektro, a eu la bonne idée de coucher ces morceaux sur un beau vinyle en 2019.
Fortuna, c’est la blonde à lunettes de soleil dorées avec un drôle de sac à main sur l’épaule. Il faut se méfier des anges. Oi Fortuna et Auta semblent sans défense, égrènent sur la longueur des sons claires et une mélodie champêtre. Et puis ça s’emballe gentiment, une vague mélancolique qui étend ses sombres tentacules, jusqu’à quasiment s’éteindre sur Auta. C’est pour mieux repartir mon bel enfant. Le chanteur a la voix d’ogre repointe son groin. L’art de l’avalanche se désagrégeant dans un solo de la mort et un long larsen qui saigne sur Oi Fortuna ou un profond accord et un chuchotement qui ne dit rien qui vaille sur Auta. Hebosagil est une longue complainte belle et mouvementée.
Kevät, c’est le mec dans sa brouette qui attend que la mer monte. Elle arrive sous le masque d’un chant féminin sur Metsätie, une sirène à la voix douce accompagnée d’accords lents et solennels. Et puis la fée électricité tente de semer le désordre et obtiendra son dû dans un final grandiose et enlevé avec des guitares libérées. Le second titre Joki a le rythme débonnaire. La frappe du batteur est pourtant toujours capable de puissance et de matraquage. C’est juste qu’il compte désormais ses coups. Et là encore, alors qu’on ne se méfie plus, Hebosagil lâche les chiens, l’ogre revient, le mer monte au galop et le mec se retrouve submergé, brouette comprise, par une vague déchaînée de bruits fracassants et un batteur récupérant ses sensations primaires. Hebosagil n’aime pas le surplace. Et donne toujours envie de les suivre.

SKX (15/12/2019)