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Great Falls/The Great Sabatini
Split 12’’
Hex records 2019

Quand deux groupes avec great dedans s’affrontent, ça ne peut donner qu’un combat grandiose. Le ring se compose d’un disque paré de rose foncé, gravé uniquement d’un seul coté et une gravure de Sean Arsenian de l’autre alors que la pochette et l’artwork en général sont l’oeuvre de Demian Johnson, guitariste-chanteur de Great Falls. Pour pimenter l’affrontement, un locked groove (à savoir pour les néophytes et les incultes, un sillon sans fin sur lequel le saphir de votre platine bloque, répétant la même note et nécessitant que vous leviez votre cul si vous ne voulez pas l’entendre pour l’éternité et devenir plus taré que vous ne l’êtes déjà) a été placé en plein milieu du disque. En principe, cette coquetterie se situe à la fin d’une face. Cependant, les deux groupes étant particulièrement taquins, un épisode fort bruitiste et heureusement assez bref concocté par les deux groupes unis dans la frivolité pour cette occasion se trouve après le deuxième titre de The Great Sabatini. C’est à la fin de ce grand moment de musique que le locked groove arrive. Comme vous êtes des personnes sensées et courageuses, vous actionnez donc le bras de votre tourne-disque pour écouter le troisième et premier morceau de Great Falls. Et si vous vous demandez pourquoi tant de complexités dans un monde déjà hostile, les groupes répondront à l’unanimité Because the bands wanted it this way, that’s why. Bien sûr, si vous écoutez ces morceaux en version numérique, ce long et fastidieux laïus technique n’aura strictement servi à rien.

Le premier coup de poing est donné par The Great Sabatini. Restant sur un bon souvenir à défaut d’être impérissable avec Dog Years en 2015 auquel Goodbye Audio a succédé en novembre 2018 (et le fait que ce quatrième album n’a pas trouvé d’écho sur cet auguste site ne signifie pas qu’il est sans intérêt, juste que les journées ne font que 24 heures), c’est en confiance qu’il est attendu. Le groupe canadien (Montréal) nous le rend bien. Pas au centuple mais fort d’une expérience grandissante depuis onze ans, The Great Sabatini a su tailler deux morceaux parfaitement huilés dans leur mécanique noise-rock trapu et féroce. Néanmoins, The Great Sabatini n’a pas oublié que Sabatini figurait dans son patronyme. Il insuffle de la surprenante délicatesse dans Bleeder Of The Pack avec des interventions acoustiques fort à propos entre deux riffs parpaings, acoustique qui perdure et file le parfait amour avec les grêlons qui tentent d’éteindre sa voix. Et comme Entartete Kunst possède également une certaine finesse et inspiration dans la présence de la guitare alors que les uppercuts pleuvent tout autour, The Great Sabatini réussit un début de combat en tout point alléchant.

Great Falls relève le gant. Le trio de Seattle est connu pour gagner tous ses matchs avant la limite. Le dernier en date A Sense Of Rest était monstrueux de ferveur. Alors pour continuer la quête et rester tout en haut de l’affiche, Great Falls a confié son sort entre les grosses mains de Tad Doyle, invité sur l’album et derrière les manettes de l’enregistrement ici. Il en résulte les cinq minutes de Dancing In Black And White avec Megan Osztrosits, la chanteuse de Couch Slut, qui vient rajouter ses râles de démente. It’s a wild world and she’s a wild girl. Merci Nick. Un titre étonnamment jovial et printanier qui... bon d’accord, ça flingue à tout va, c’est du pur et evil Great Falls, la folie est de ce monde et Great Falls s’en tape les cuisses à devenir malade de rage, l’éclatement général en plus de l’insurrection dont Our Loneley Old Year est le prolongement hystérique avec une magnifique cassure de reins en plein milieu.
Un combat de chef. Tout le monde est gagnant, tout le monde est content. Moi le premier.

SKX (16/05/2019)