faking
slugthrower



Faking
No Comfort – LP
Slugthrower records 2019

Il existe des annonces de sorties d’albums qui vous échauffent plus que d’autres. Un nouveau disque de Faking fait partie de cette liste restreinte. Alors tant pis si No Comfort ne comporte que six nouveaux morceaux. Chacune des vingt-trois minutes est passionnante et continue de placer le trio de Philadelphie dans le gratin des groupes noise-rock qu’on aime suivre de très près.
Pourtant, un changement notable est apparu depuis Goddamn Cowards. Le bassiste Mark Diehl a laissé sa place à Matt Garfield qui joue aussi de la basse mais sur un synthé. Et ça, dans un groupe foncièrement noise-rock, ça ressemble à un crime de lèse-majesté. Ce qui n’empêche pas Faking de toujours sonner d’enfer. Faking a été ainsi obligé de repenser le son de sa musique sans rien perdre de sa force et de sa pesanteur. Si les fréquences basses sont toujours présentes, elles n’ont pas tout à fait le même grain, ne cogne pas avec le même rendu mais elles vibrent intensément de tout leur poids. Et pour être tout à fait honnête, si cela n’avait pas été écrit sur l’insert, je ne l’aurais pas remarqué. La guitare prend plus de place et de volume. La batterie avec sa grosse caisse massive est un pilier central inamovible source de certitudes rassurantes. Nous voilà sauver.
Mais c’est également une histoire de compositions. Le noise-rock de Faking est devenu moins frontal ce qui le rend encore plus tendu. Le rythme général évolue dans un mid-tempo lourd et pénétrant ce qui le rend plus rampant et déviant. Les failles s’agrandissent. Les échardes bruyantes et les éclats d’intensité gagnent en luminosité. La colère sourde répand les tentacules d’un drame imminent. No Comfort suinte fortement une émotion sombre, tourmentée, devient déchirant et surtout, prend des chemins personnels. Faking a abandonné tout idée du bruit et de l’agression pour le simple plaisir de faire mal, ce qui n’a jamais été de toute façon son propos. Six morceaux de caractère avec en tête les géniaux Less & Less et Not A God qui puisent au plus profond de leurs chairs de quoi ériger patiemment et intelligemment des murs invulnérables, de quoi s’agenouiller devant une telle maestria qui rend le noise-rock toujours aussi indispensable quand il est exécuté avec une telle classe et maîtrise du fracas, s’inspirant de ce qui a été fait de mieux pour continuer à écrire sa propre histoire. Incontournable.

SKX (27/11/2019)