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Bad Breeding
Exiled – LP
One Little Indian records 2019

On ne change pas une équipe qui gagne. Ben Greenberg à la production. Un texte de Jake Farrell se terminant par Keep your hate pure parce qu’il ne s’agirait pas de s’endormir face aux bien-pensants de ce monde, liens vers des sites anti-capitalistes, artwork toujours dans la lignée d’un Crass ou Dead Kennedys et signé cette fois-ci par Nicky Rat. La lutte continue. Plus que jamais. Comment pourrait-il en être autrement.
Le quatuor de sa gracieuse majesté s’obstine à balancer des cocktails molotovs sur ces cons qui nous gouvernent, essentiellement anglais en ce qui les concerne. Mais la connerie étant une valeur internationale, n’importe quelle classe dirigeante pourra aisément se reconnaître.
Bad Breeding n’y va toujours pas avec le dos de la cuillère. C’est du brûlot punk-noise férocement abrasif. Du genre à décoller le papier-peint le plus solide avec toutes les vibrations décapantes et un coup de poignet âprement déterminé. Bad Breeding n’a jamais cherché à embellir son propos, bien aidé en cela par l’esthétisme intransigeant de Greenberg. Exiled est donc comme le précédent maxi Abanddonment ou Divide, un troisième album synonyme d’une charge qui ne surprend pas mais elle est tellement belle et violemment héroïque qu’on ne peut que succomber à ce nouveau crachat sulfateux.
Bad Breeding ne faiblit (toujours) pas. Au contraire. Il est toujours possible d’ergoter sur le son, gagnant en maîtrise, plus fort, plus gros, plus haut, plus dans le rouge, plus mieux ou sur les intentions encore plus belliqueuses et désespérées mais tout ça n’est franchement pas évident. Seule compte la clarté de la lune. Exiled brille surtout encore un peu plus sur les hordes de révoltés par des compos efficaces comme un coup de poignard, une propension à affûter leurs lames ne laissant aucune place au hasard et au destin qui vous attend. Bad Breeding dégomme tout et tout le monde avec des titres pointus, des rythmes grondant à brides abattues qui offrent de l’espace, une approche noise avec la basse rentre-dedans et un guitariste qui vrille les cerveaux, dérape, mitraille, couine et grêle sur les cordes écorchées. Un sens du chaos savamment orchestré possédant l’allure d’une droite foudroyante. C’est rare et redoutable. Et un saxophone, celui de Lewis Evans, en rajoutant parfois une couche dans le bordel, offrant une densité noise et free pour faire perdre le sens de l’orientation comme sur A Rag Hung Between Two Trees. Et entre toutes ces courtes décharges, Bad Breeding nous refait le coup des deux morceaux plus conséquents comme sur Divide. Ils s’appellent Theatre Of Work et Tortured Reality, concluent à chaque fois une face (jusqu’à l’infini sur Tortured Reality et son magnifique locked groove) et démontrent une nouvelle fois que Bad Breeding sait tenir la distance et possède plusieurs cordes à son arc tendu comme un string.
Bad Breeding est bien plus qu’un groupe hardcore politisé, une version moderne de Crass. Les profils de ce groupe sont larges bien qu’il laboure sans cesse un sillon identique et serré dont les détails apparaissent pour qui veut bien gratter la brutalité apparente. C’est un catalyseur de bruits aux sources variées (noise, hardcore, anarcho-punk, post-punk), un conglomérat de dynamites ratissant large pour former une unité de combat précise et furieusement opérationnelle sur laquelle il est un vrai bonheur de venir se faire exploser.

SKX (12/08/2019)