throat
svart


Throat
Bareback – LP
Svart records 2018

Throat fait sa mue. Et je ne dit pas ça uniquement pour la belle voix grave qui ouvre l'album. Les Finlandais s'essayent à de nouveaux jeux, expérimentent, une approche musicale inédite qui parfois les rend très différents des enregistrements précédents. D'où le nom Bareback ? Vu mon triste niveau d'anglais, je pensais que ce titre avait un rapport avec le mal de dos, impression renforcée par le visuel de la pochette. Que nenni. Une pratique dont je vous laisse le soin de chercher la signification exacte sur votre moteur de recherche préféré. On en apprend tous les jours. Un album sans capote comme pour dire que Throat évolue sans filet, prise de risque maximale, suite du concept entamé par l'album précédent Manhole ? Une chose est sûre, Throat n'a peur de rien, n'attend personne et jouit sans entraves. Et ce n'est pas le seul changement d'un bassiste qui explique cela.

Throat chevauche vers de nouveaux horizons, éclate son noise-rock en une multitude de fragments disparates, devient plus mélodique, travaille les ambiances, change la cadence en l'alourdissant, le pas pesant, sombre, éclaircit le propos, aère les compos, chante d'une voix claire et puissante et pourtant, c'est toujours Throat. Capable aussi de flagellations sonores, de cris de brutes, de coups de butoir meurtriers, de dissonances aggravantes, de faire mal et n'épargner personne de son jus brûlant et épais. Et surtout, Throat n'aime désormais plus faire comme les autres. Bareback débute ainsi sur son morceau le plus long, celui que n'importe quel autre groupe aurait choisi pour conclure, les huit minutes du lent et pénétrant Safe Unsound avec un final industriel à mort que j'adore, le bruit de l'usine qui fait pleurer les tympans, juste parce que le bruit, c'est bon et parce que Throat aime emmerder le peuple. Le début de la face B avec Shortage (Version) oeuvre également dans des climats étranges et très surprenants pour Throat. Atmosphère gothique caverneuse matinée d'échardes électroniques, nappes noisy, rythme martial dans le fond, chant méconnaissable, Throat prend de la profondeur.

Et surtout, Throat élève le niveau d'écriture, le personnalise. Un bouquet de morceaux avec l'énorme Recut en tête montrant que les Finlandais de Turku ont les idées riches et variées, le sens du riff, de la mélodie qui pimente les rapports, le matraquage contrôlé, étoffant leur manière de chanter, arrangeant leurs morceaux d'une façon bien plus fine qu'avant tout en gardant leur niveau d’agressivité et d'abrasion, au point d'oser un titre comme No Hard Shoulder finissant par bien passer alors qu'il faisait tout drôle au départ. La seule vraie fausse note, c'est la seconde guitare et son solo mélodique qui en fait beaucoup trop en débarquant sur la fin de Maritime qui avait pourtant excellemment débuter. Terminer Bareback ainsi est un peu rude mais ne saurait gâcher l'énorme plaisir de découvrir un groupe qui s'est remis en cause, cherche et s'offre une nouvelle peau. Bareback, risque gagnant

SKX (18/10/2018)