huffduff
chuchu
metamatter
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Huffduff
HF/DF LP
Meta Matter, ChuChu records 2018
Quand un ancien Eniac se pointe au portillon, je me bouscule toujours
pour aller voir de quoi il retourne. Martin Rudolph (alias Sissy Phosphor),
le chanteur du groupe d'Hambourg qui avait fait notre bonheur au début
du nouveau millénaire, s'est entouré d'autres vétérans
de la scène noise-rock-punk allemande et publie un premier album
qui est une histoire de fréquences et de triangulation. HF/DF
pour High Frequency/Direction Finding, les U-Boot au fond de l'océan
s'en rappellent encore pendant la bataille de l'Atlantique. Et une histoire
d'héritage aussi car le spectre d'Eniac
flotte fortement sur Huffduff. On va pas s'en plaindre.
Huffduff émet les ondes d'un noise-rock volatile, perturbé,
amusant, finement aiguisé. Et commence par le mal nommé
I Don't Wanna Dance Anymore car il est impossible de ne pas faire
trémousser son gras à l'écoute des dix compos sur
ressort de HF/DF. La chorégraphie engendrée sera
il est vrai loin des standards de la perfection. Possible qu'on vous prenne
pour un vilain canard boiteux mais la rythmique encanaillée de
Sun Dra et Herr Fust ne permet pas l'immobilisme. Niveau standard de la
noise, ce n'est pas non plus la fidélité incarnée
mais ce couple basse-batterie est à l'image de la musique de Huffduff.
Une manière d'aborder le noise-rock par une face personnelle et
subtilement pervertie. Des airs de mais ne sonnant finalement pas comme.
La guitare de Steve Albino (qui a aussi enregistré l'album ou l'humour
allemand à son comble) sonne parfois comme Shellac (le riff de
Basic Human Behaviour) mais c'est trop peu pour une comparaison
en bonne et due forme. Idem pour The Fall dont l'influence émerge
parfois.
La basse suggère des groupes noise-rock ancestraux qui savent faire
rentrer leurs instruments dans le lard mais jouer les gros durs sous des
allures implacables et carnassières ne sont définitivement
pas le genre de la préposée à la basse. Huffduff
affleure plusieurs genres mais aime brouiller les ondes à l'instar
de la voix continuellement trafiquée (qui passe par un antique
combiné téléphonique en concert) et frelatée,
s'embarque dans des plans durs et anguleux avant de prendre la tangente
sur des humeurs plus ludiques et déviantes, diffuse un parfum trépidant
et turbulent, glisse vers une atmosphère plus maussade mais jamais
très longtemps. Huffduff ne pratique pas une noise féroce,
sombre, atrabilaire sous un mur de saturations. HF/DF est un album
rempli d'accroches entraînantes, de mini-riffs mélodiques
jubilatoires, d'un sentiment fluide, d'arpèges clairs et piquants,
d'un mordant sans prise de tête, de secousses qui mettent de bonne
humeur et s'affichent dans des morceaux dont le cinquième résume
parfaitement la situation : Style & Class.
SKX (03/12/2018)
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