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Get Your Gun
Doubt Is My Rope Back To You - LP
Empty Tape records 2017

Get Your Gun recharge. Et la balle ne provoque pas semblables ravages que le précédent tir The Worrying Kind. Elle tergiverse, prend son temps et des chemins détournés, l'impact n'est pas aussi percutant. De quoi se sentir déboussoler.
La dynamique du trio danois a perdu de sa virulence, préférant élaborer des ambiances de plus en plus funestes plutôt qu'intensifier le fracas des rythmiques ou l'électricité galopante. Modification de l'approche de la tension. Moins d'angles et plus d'étendues sombres. Moins de guitares épiques et surplus de nappes de synthé. Batterie plus discrète de Simon Westmark se résumant souvent à une percussion martiale, ressemblant à des roulements tribaux avec des maillets ou des coups de fouet sur une frêle cymbale. Et le chant très expressif de son frère Andreas, entre lyrisme et grandiloquence, une frontière souvent ténue, parfois trop affecté, ce qui ne m'avait pas spécialement marqué sur le premier album, mais qui fatalement convainc au bout de ses fortes cordes vocales nordiques charismatiques.

La balle ne fait pas de ricochet, ne perfore pas. Elle s'écrase lentement, irrémédiablement. Et les chairs finissent par rougir. L'intensité, la puissance se manifestent autrement. Le brasier s'allume différemment et au final, Doubt Is My Rope Back To You fait toujours trembler les murs. Certaines longueurs le temps que les (longs) morceaux se mettent en place ou se terminent subsistent. Des passages où la tension se relâche, la beauté se fait moins évidente, voir un titre en entier comme Open Arms moins prenant.
Pour tout le reste, Get Your Gun a construit une tragédie implacable. Avec des flèches imparables comme Haywire ou le magnifique You're Nothing. Quand Get Your Gun trouve l'alliage parfait entre mélodie, envolée lyrique, sous-tension poignante, chant qui prend aux tripes, rythmique qui s'emballe, noirceur belle et insondable, ce disque décolle à des hauteurs insoupçonnables. Love Like Feathers, le plus véhément du lot, ouvre de belles manières les hostilités. Stray prend le relais, s'endort un peu en route mais toute la fin avec saxophone et orgue est sublime. La suite est une longue procession dramatique et ténébreuse qui s'achèvera dans les dix minutes des montagnes russes de Enough For Everyone, titre trompeur. Musique dépouillée, intransigeante, solennelle, subtile, avec ses pics d'adrénaline et de mélodies poignantes, jouant sur les volumes et les silences. Et un son qui vous retourne. Chaque instrument résonne contre les parois du bide. Clair et dur. Une musique toujours aussi difficile à cataloguer. Qui trempe autant dans le heavy ou dark rock, l'ambient, l'expérimental, s'adressant aussi bien aux fans des Swans ou de Nick Cave. Et des tonnes d'autres sans doute. La deuxième balle de Get Your Gun a failli ne jamais atteindre sa cible. Mais une fois lancée, malgré quelques réserves, elle est impossible à arrêter et les ravages sont un régal.

SKX (08/02/2018)