gerda
wallace
bloodysoundfucktory
sonatine
shove


Gerda
Black Queer – LP
Shove, Sonatine, Bloody Sound Fucktory, Wallace records 2018

Cela a finit par arriver bien que rien ne soit inscrit dans le marbre. Gerda a sorti un album laissant sur sa faim, un album où le feu ne prend pas. Malheur. C'était pourtant l'amour absolu depuis cinq disques capables de changer le cours de ta journée. Black Queer est loin d'être mauvais mais il est en dessous de ces prédécesseurs qui avaient certes mis la barre très haute.
Un problème de son tout d'abord. Enregistré par le bassiste dans les collines italiennes, Black Queer manque d'impact, notamment la batterie. Sur Lulea TX ou Terzo Regno, ça fait comme un bruit mécanique, sans force, sans couleur. Et c'est tout l'album au final qui pâtit de cet enregistrement trop étriqué, trop rustre, sans ampleur. L'intensité légendaire de Gerda nécessite un écrin de poids. Sur Black Queer, ce n'est pas mis en valeur et ça ne décolle jamais véritablement.
Et comme tout est lié, les morceaux n'ont pas leur folie habituelle, ne mettent pas la pression comme si leur vie en dépendait, répétant des gammes en mal de régénération. Leur noise-rock hardcore rentre dans le rang alors qu'il éclatait tout sur son passage. Black Queer comporte pourtant ses morceaux qui cassent la nuque, tendent les nerfs et arrivent à faire léviter par la transe violente qui en découle. Notte, Hafenklang ou les presque neuf minutes de Theme, le reprise de PiL, montrent le visage de Gerda qu'on aime, cette pression que les Italiens infligent sans sourire, l'adrénaline bouillonnante et les structures expérimentales dépassant le strict cadre d'un groupe hardcore-noise. Il manque pourtant quelque chose pour que l'incendie soit énorme mais on a envie d'y croire. Parce que c'est Gerda et que ce groupe est à part.
Mais apparemment, l'approche de cet album a été différente, une parenthèse intime où le groupe a voulu se retrouver, tout faire à la maison, sans esbroufe et en dédiant Black Queer à un ami, Francesco Vilotta, chercheur de l'absolu récemment décédé à la suite d'une dépression et musicien de Vel, un groupe dont faisait également partie le bassiste Alession Compagnucci et dont Gerda reprend Figlia. Il n'est plus question de tout fracasser mais de se montrer à nu, tel quel, sans surenchère, près de l'os, avec tous les défauts apparents. Black Queer, ça reste du Gerda. Pas notre préféré mais on saura s'en contenter.

SKX (19/06/2018)